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& quatre à cinq cens hommes de la flotte qui moururet par le chemin de maladie, mifere & autrement. Si les habitans du Recif auoient fubjet d'eftre ioyeux de ce fecours, ceux qui le compofoient ne le furent pas moins, de se yoir arriuez à bon port & à l'abry des peines & fatigues que la mer fait endurer; mais peu de iours apres bien estonnez de n'eftre plus traittez à la mode d'Europe. Plus d'vn mois fe paffa, toute la flotte venue, qu'on ne pouuoit trouuer vne bouchée de pain pour vne pistole; ce n'eftoit que les Commiffaires qui en donnoient fur des billets fignés desSeigneurs, à chacun par fepmaine deux liures de pain noir, vne liure & demye de chair, &vne liure de lard, des pois & des febues, de l'huile d'oliue, de l'eau de vie & du vinaigre, & quelques fois du vin d'Espagne vne mutfe, qui eft la huictiefme partie d'vne pinte, & deffence ex ftoit faite d'en donner dauantage que ce qui eftoit prescript dans ces billets, fur peine de la vie: mais pourtant qui auoit beaucoup d'argent trouuoit affez moyen d'en achepter des Commiffaires, en fecret: car pendant mefme la difette la plus extréme, vn luif pour cent efcus recouura d'eux vn alquéere de farine, qui eft vne mefure qui peut pefer quinze à feize liures.

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Les nouueaux feigneurs après auoir fait

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voir leurs lettres de prouifion à ceux qu'ils trouuerent en charge, ils leur cederent incontinent la place. En entrant en poffeffion de cette dignité, il y eut difficulté entre les Confeillers pour la feance;laChambre d'Amfterdam en auoit choifi deux, comme nous auons dit, les fieurs Trouire & Haecx qui n'eftoient que marchands ;Meffieurs Vangoch & de Beaumont gens de lettres & officiers en leur patrie, ne vouloient pas fouffrir qu'ils les precedaffent mais lePrefident Schonemburgh ordonna que de mois en mois & tour à tour, chacun d'eux feroit affis aupres de luy, que l'vn de ceux d'Amfterdam commenceroit, Monfieur Vangoch apres, puis Monfieur de Beaumont, & en fuitte l'autre d'Amfterdam. Ils eurent toft connu que leurs forces n'eftoient pas baftantes de la moitié pour attaquer les Portugais, blafmerent fort les an ciens feigneurs d'auoir fait le mal moindre qu'il n'eftoit & n'en auoir pas efcript au vray (c'eftoit exprés qu'ils l'auoient fait, afin qu'il s'en trouuaft plus facilement d'autres pour les venir releuer). Les officiers de la Iuftice, Capitaines & foldats, gens de mer, bourgeois & habitans, fe plaignirent tous de leur gouuernement, qui d'vne façon, qui d'vne autre. Ils s'en retournerent en Hollande, où ils n'eurent pas plus de reception

des

des Chambres, ny de la Compagnie des Indes, que des perfonnes priuées, furent veus auec mefpris des Dixneuf; on fit courir par toutes les villes des libelles diffamatoires imprimez, qui fe vendoient publiquement contre leurs perfonnes, & façons d'agir dans le gouurnemét, plufieurs particuliers interessez les menaçoient de leur faire faire leur procez. Aulieu que l'aduenement de ces Meffieurs à la magiftrature cuft deu eftre fecondé de quelques heureux fuccez, il femble que la mauuaife fortune fe declara d'abord contre eux. La première nouuelle qu'on leur porta, fut que la plus grande partie des Tapoyos & Brefiliens, qui auoient toufiours efté amis des Hollandois & combattu pour leur feruice, les auoient abandonnez, & pris le party de leurs ennemis, en hayne de ce que fix mois auparauant Georges Garsman General de la milice, auoit fait tuer Iacob Rabbi Allemand, homme determiné, qui s'eftoit fi bien façonné auec ces Sauuages en leurs moeurs & façons de viure,qu'il eftoit deuenu comme l'vn d'eux, l'ayants pris en fi grade affection,qu'ils en firent l'vn de leurs principaux Capitaines. Du fubiet pourquoy Garfman fit tuer Iacob Rabbi, fes amis l'attribuoient au reffentiment que Garfman auoit du meurtre & affaffinat que ce Iacob Rabbi auoit commis contre le

R

pere

de fa femme :car il choififfoit les plus meschans Tapoyos, &auec eux exerçoit diuers brigandages dans le pays: fa mort, difoient-ils, n'eftoit qu'aduantageuse au public, & qu'il auoit bien fait en vangeant la mort de fon beau- pere, d'auoir ofté hors du monde vn volleur qui meritoit cent fois le fupplice, qu'il n'y auoit en tout cas en cela que la formalité de le punir, qui deuoit eftre condamnée. Ceux qui connoiffoiet particulierementGarfman & fçauoient iuger de fes actiós, fouftenoient que ce n'auoiet pas efté là ses motifs, mais qu'ayantappris que Iacob Rabbi du fruit de fes volleries,auoit amaffé vn riche butin, caché en lieu que Garfman fçauoit bien, il le fit tuer pour en profiter, & en effect on on luy trouua quelques ioyaux recognus pour ceux que Iacob Rabbi auoit defrobez. Incontinent que lean Dary & tous fes principaux amis fçeurent cette mort, ils c enuoyerent demander que la perfonne de Georges Garfman leur fuft liurée, pour en faire la Iuftice eux-mesmes, pour auoir tué vn de leurs chefs, dont la connoiffance leur appartenoit, quand bien il eut efté coulpable, fuiuant le priuilege qui leur en auoit efté donné par les Eftats generaux & la Compagnie des Indes, de connoiftre feuls des crimes de ceux de leur natio; mais que Iacob Rabbi ne pouuoit

eftre de rien accufé, qu'il n'auoit iamais efté traiftre au pays. Que pour le meurtre qu'il fit du beau-pere de Garfman, celuy qu'il tua luy en auoit donné le fujet, comme ils fçauoient tres-bien; que quantà fes vols & larcins, s'il auoit pris du beftail, c'eftoit pour viure feulement; qu'il n'eftoit pas raifonnable que luy & fes gens mouruffent de faim, lors qu'on leur refufoit à manger: fi des inftruments de fer, c'eftoit pour s'en feruir par la campagne, pour le feruice mefme des Hollandois, à qui ils n'auoient iamais demandé folde, & pour lesquels ils s'eftoient souuent expofez; que pour l'or & l'argent ils n'en auoient que faire, & l'eufsent fait rendre fi on leur en eut parlé; & qu'en tout cas s'il auoit à eftre chaftié, ce deuoit eftre felon la couftume des Hollandois, mais qu'on l'auoit affaffiné lors qu'on le pouuoit facilement prendre, qu'ils le cheriffoient plus que cent autres, youloient bien neantmoins eftre toufiours leurs amis, mais qu'ils vouloient auffi auoir Garfman pour le faire mourir. Les Seigneurs leur refpondirent que Garsman eftoit haut officier & n'auoient pas le pouuoir de le liurer, ny mefmes de le faire mourir fouuerainement, hors les crimes d'Estat; qu'il auoit la voyed appeller aux Dixneuf du iugement qu'ils rendroient, & qu'au parauant que de le condamner il le falloit

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