Изображения страниц
PDF
EPUB

Lorsque le savant quitte la solitude tranquille de son cabinet pour mettre en pratique les spéculations de la Théorie, il peut trouver aussi les dangers et les fatigues; mais il en trouve le prix dans les jouissances que lui font éprouver les motifs glorieux qui le portent à s'y dévouer, et les résultats qu'il doit obtenir pour l'avancement des connoissances humaines. Malgré les obstacles qu'avoient rencontrés les commissaires français, toutes leurs opérations furent terminées vers le 12 novembre 1787. Ils repassèrent alors en Angleterre, ils y revirent leurs coopérateurs, et ces savans unis dans leurs travaux, s'unirent encore par les liens de l'amitié.

Pendant le séjour qu'ils firent à Londres, les commissaires français eurent beaucoup à se louer de l'accueil favorable qu'ils reçurent des membres les plus distingués de la Société royale de Londres, et surtout du chevalier Bancks. Le plus beau privilége des sciences est d'unir par une douce fraternité les savans de tous les pays. Cette union respectable et sacrée n'est détruite ni par les jalousies nationales, ni par les discussions politiques; elle se conserve même au milieu des feux de la guerre.

Environ deux ans après, les résultats des opérations anglaises et françaises furent publiés en Angleterre par le général Roy, et en France par M. Cassini. Pour les faire concourir à la détermination précise de la différence des méridiens entre les Observatoires de Paris et de Greenvich, les commissaires choisirent les quatre points principaux de jonction, Douvres, Calais, Blancnez et Mont-Lambert; ils en calculèrent les distances. au méridien de Greenvich, ainsi qu'à celui de Dunkerque, et le nombre des degrés de longitude que comprennent ces deux distances. Dans leurs réduc

tions en longitude, ils supposèrent, conformément à la loi adoptée par Bouguer, l'accroissement des degrés du méridien de l'équateur aux pôles, proportionnel à la quatrième puissance du sinus de la latitude. Ils firent aussi les mêmes calculs dans la supposition des méridiens elliptiques, et de l'aplatissement de trouvé par Newton, La première hypothèse donna pour la différence des méridiens de Greenvich et de Paris, en tenant compte de la distance de Dunkerque situé à l'Occident de ce dernier, 2° 19' 26", 2 ou 9' 18", 6 de temps et la seconde, 2° 20′ 9′′, 4 ou 9' 20", 6 de temps (1).

[ocr errors]

Les travaux exécutés par la jonction des deux Observatoires méritent sans doute la plus grande confiance. Elle est due à l'habileté des hommes à qui ces importantes opérations ont été confiées; mais les hypothèses sur lesquelles sont appuyées leurs réductions en longitude, sont aujourd'hui totalement abandonnées.

La première, imaginée par Bouguer pour concilier diverses mesures des degrés des méridiens qui donnoient des aplatissemens différens, ne peut être regardée comme une loi de la nature; car l'hypothèse physique qui représenteroit les mesures des méridiens, devroit encore satisfaire aux variations de la pesanteur observées à la surface de la terre; mais d'après la remarque de M. Laplace, l'accroissement de la pesanteur de l'équateur à Pello, est égal suivant les observations, à 0,0045 de la pesanteur totale, et suivant l'hypothèse de Bouguer, il n'en seroit que (2) la 0,0027 partie.

(1) La différence des méridiens de Paris et de Greenwich, adoptée aujourd'hui par le Bureau des longitudes de France est de 9 21:

(2) Exposition du Système du Monde, liv. 4, chap. 7..

La seconde hypothèse suppose l'homogénéité de la terre, contestée par les faits, et donne un aplatissement trop grand. Les opérations faites en France par Méchain et M. Delambre, comparées avec celles de Bouguer et de la Condamine, au Pérou, le réduisent, d'après les derniers calculs, à la 30ge partie du diamètre de l'équateur terrestre; il en est la 321° d'après l'ensemble de toutes les anciennes observations sur la longueur du pendule, la 303o d'après les dernières faites en France sous différens parallèles, et la 305e d'après la Théorie de M. Laplace, sur les inégalités lunaires. Ce dernier aplatissement, qui tient un milieu entre les résultats les plus probables, paroît devoir mériter la préférence dans tous les calculs astronomiques.

ne

Au reste les observations que nous faisons ici sur les diverses hypothèses de l'aplatissement de la terre portent aucune atteinte à l'exactitude des opérations géodésiques exécutées tant en France qu'en Angleterre, pour la jonction des deux Observatoires'; elles pourront toujours concourir avec les observations des éclipses, et surtout celles des occultations d'étoiles, à déterminer de la manière la plus précise la différence de leurs méridiens.

ARTICLE II.

MESURE DE L'ARC DU MÉRIDIEN
COMPRIS ENTRE LES PARALLÈLES

DE DUNKERQUE ET DE BARCELONE.

Nous allons parler maintenant d'une opération géodésique, supérieure à toutes celles des anciens et des mo

dernes, c'est-à-dire, de la mesure de l'arc du méridien compris entre les parallèles de Dunkerque et de Barcelone, qui vient d'être exécutée par Méchain et M. Delambre.

Les mesures de la terre les plus célèbres chez les anciens, sont celles d'Eratosthène et de Possidonius. Le premier détermina, par la hauteur solsticiale observée à Alexandrie, l'arc céleste compris entre cette ville et Syenne, où le soleil, disoit-on, éclairoit le fond des puits le jour du solstice, et les corps élevés verticalement ne donnoient aucune ombre à midi, Le second mesura par les hauteurs de l'étoile Canopus, le nombre des degrés, du méridien, interceptés entre Rhodes et Alexandrie; mais ils ne firent l'un et l'autre qu'une évaluation grossière des distances comprises entre les extrémités des arcs mesurés, et se trompèrent d'ailleurs, l'un de trois degrés et l'autre de deux, en longitude.

La mesure de la terre, ordonnée par la calife Almamon, vers le commencement du neuvième siècle, n'avoit pas une plus grande précision. Ses astronomes s'assemblèrent dans la vaste plaine de Singar en Mésopotamie; ils observèrent la hauteur du pôle, se séparèrent en deux troupes, dont l'une marchoit vers le nord et l'autre vers le midi, en mesurant chacune de son côté la route qu'elle, parcouroit. Les deux troupes ne s'arrêtèrent que lorsque la hauteur du pôle, de temps en temps observée, les eut averties qu'elles avoient chacune parcouru un degré terrestre. Les deux degrés ainsi mesurés par les astronomes arabes, ne s'accordèrent qu'à 600 toises près, erreur qu'ils partagèrent sans scrupule entre les deux degrés. :!:

Peut-on mettre au nombre des mesures régulièrement exécutées, celle de Fernel, médecin et géomètre du

seizième siècle, qui, pour évaluer la distance de Paris à Amiens, compta le nombre des révolutions de la roue d'une voiture?

Snellius, qui vécut au commencement du dix-septième siècle, quoiqu'il eût employé une meilleure (1) méthode, ne fut pas plus heureux dans sa mesure d'Alcmaer à Berg-op-Zoom. Norvood, en 1635, se trompa de 400 toises dans celle de Londres à Yorck; Riccioli et Grimaldi, de 5000 sur la mesure d'un degré du méridien.

Les mesures terrestres les plus célèbres parmi les modernes, sont celle de Picard, exécutée en 1669, celle de Cassini et de Lahire, commencée en 1683 et terminée après une longue interruption en 1718, celles de Bouguer, la Condamine et Godin, sous l'équateur, de Maupertuis, Clairaut, Lemonnier, Camus et Outhier vers le cercle polaire; la première exécutée depuis 1736 jusqu'en 1742, et la seconde dans l'année 1735; celle de La Caille, au cap de Bonne-Espérance; enfin l'opération de la méridienne vérifiée en 1739 par le même astronome et Cassini de Thury.

Quoique toutes ces opérations aient été faites avec une précision inconnue aux anciens, elles n'avoient pas encore atteint le degré d'exactitude des dernières mesures exécutées en France.

Picard, dans la mesure de l'arc céleste compris entre le zénith de Paris et celui d'Amiens, n'ayant pu tenir compte des mouvemens apparens des étoiles qui ne

(1) La méthode de Snellius quant à la partie géométrique, consiste à mesurer une base et à former une suite de triangles d'une extrémité à l'autre de l'arc dont on veut connoître la valeur,

furent

« ПредыдущаяПродолжить »