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C'est également à la plume élégante de M. Philarète Chasles que l'on doit la belle imitation suivante :

Enfoncements des bois, océans de verdure,
Dont le jeu du zéphyr vient caresser les flots,
Doux murmure des vents, du feuillage, des eaux,

Sur l'humide gazon, théâtre de féerie,
Mille grains d'or semés comme une broderie,

La clochette d'albâtre au calice d'azur,

La fleur taillée en urne, et sa coupe d'or pur,
Et le rubis ardent des jeunes primevères,
Du peuple aérien parures éphémères,

Frêles et doux trésors dont l'éclat fait le prix,

Par ces doigts délicats avec soin réunis ;

Enfin, sous les halliers ce bruit qui se prolonge,

Doux comme un pur encens, et léger comme un songe,

La chanson de la fée et ses lointains échos,

Berçant la jeune reine, et charmant son repos.

Puck se fait remarquer par son adresse et son ingénuité :

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La fée. << Si je ne me trompe, à vos termes, à votre air » et à votre démarche aisée, je crois voir en vous ce démon » espiègle que l'on nomme dans les champs Robin le bon » Luron,» ajoute la fée, après lui avoir donné l'épithète ci-dessus. Puis elle continue, en le caractérisant par la spécialité de ses fonctions :

« Dites, n'est-ce pas vous qui le soir, à la veillée, aimez à >> lutiner nos jeunes villageoises, qui volez, sans pouvoir être >> pris sur le fait, le lin et la crême, qui troublez par cent tours >> malins la bonne ménagère, et qui la mettez en colère? Tantôt » son beurre ne prend pas; tantôt son rouet tourne avec bruit,

» ou bien c'est sa boisson qui, privée de levain, n'a plus que le » goût de l'eau. N'est-ce pas vous encore qui, dans les nuits >> sombres, tirez le voyageur hors de son chemin, et qui, lors» qu'il erre dans la plaine, vous riez de sa peine, en l'égarant toujours davantage? Quant à ceux qui, charmés de votre >> esprit malin, vous appellent le bon Puck, ou le joli démon, >> vous leur portez bonheur, et vous faites leur ouvrage. Dites » donc, me trompé-je ? Oh! je parie que c'est bien vous. >> Interrogation à laquelle Puck répond dans les termes suivants :

« Oui, tu as bien dit, je suis ce feu-follet et bouffon d'Obé>> ron, qui, la nuit, aime à faire éclater sa gaieté maligne. »>

Shakspeare a donné au lutin et au démon malin des devoirs et des fonctions d'une espèce très-différente; il est le messager et le serviteur affidé du roi des esprits qui, à cause de sa capacité, l'appelle bon et doux. Il réunit à ses qualités héréditaires la promptitude, la légèreté et le savoir intellectuel des esprits les plus élevés dans le monde des fées, comme le dit Obéron : << Va me chercher cette herbe: et sois revenu avant que le >> Léviathan n'ait nagé l'espace d'une lieue. >>

La distinction entre les deux espèces est exactement marquée quand Puck, d'après quelque appréhension, fait observer à Obéron que la nuit diminue vite; que le messager de l'Aurore paraît, et que tous les esprits infernaux voltigent vers leurs lits:

Puck.

Mon maître, hâtons-nous, car notre heure est venue,

Les dragons de la nuit ont traversé la nue.

Le jour va se lever, il jette en souriant

Ses premières lueurs au bord de l'Orient.

A son approche on voit les spectres se dissoudre,
Du cimetière ils vont encore peupler la poudre.
Les ombres des damnés, qui dans les carrefours
Et sur les flots impurs, la nuit, errent toujours,
Dans leur couche où les vers les tiennent enchaînées,
Craignant l'éclat du jour, sont déjà retournées.

La lumière fait peur à ces ombres du soir,

Ce sont les pâles sœurs de la nuit au front noir.

Obéron lui répond aussitôt :

Nous sommes des esprits d'une plus pure essence.
Moi, j'ai souvent joué lorsque le jour commence,
En foulant les tapis des bois où court le vent,
Avec l'aube argentée et le soleil levant.

Au seuil de l'Orient j'ai suivi la lumière,

Jusqu'à l'heure où sa porte en s'ouvrant tout entière
Jette, rouge de feu, sur les flots de la mer
Les rayons lumineux qui scintillent dans l'air,
Changeant en vagues d'or son onde verte et sombre.
Cependant hâte-toi, mettons à profit l'ombre.
Nous pourrons achever l'ouvrage commencé
Avant qu'à l'Orient le jour ne soit versé.

Mme LOUISE COLET.

Le roi et la reine des fées, qui, dans Chaucer, sont identifiés avec le Pluton et la Proserpine des enfers, sont, sous le nom d'Obéron et de Titania, représentés par Shakspeare sous un jour aimable; car, quoique jaloux l'un de l'autre, ils sont ordinairement employés à alléger les malheurs des bons et des infortunés. Leur influence bénigne, paraît en effet s'étendre sur les pouvoirs physiques de la nature; car Titania dit à son époux que, d'après leurs querelles de jalousie, une étrange intempérie s'est emparée des éléments.

Ainsi que les Liös-Alfar, ou esprits brillants des Goths, les fées de Shakspeare se plaisent à donner des bénédictions, à faire prospérer les ménages. Car cette race bonne et douce, entrant dans la maison de Thésée au milieu de la nuit, reçoit les ordres suivants de leur bienveillant monarque:

Titania.

-

Avant que le dernier feu meure,
Que dans cette heureuse demeure
La lumière brille en faisceau,
Près des épouses attifées,
Que les sylphes et que les fées
Sautent comme fait un oiseau
Lorsqu'il s'élance d'une épine.
Esprits, lutins, de mon ballet,
Allons, répétez ce couplet,
Chantez, dansez, troupe badine.
Répétez ce couplet par cœur,
A chaque mot une cadence,
Et les doigts enlacés, en chœur
Chantons et commençons la danse.

Oberon.

Que chaque fée erre dans ce palais,
Jusqu'au lever de l'aube orientale;
Que des époux la couche nuptiale
Soit visitée: esprits, bénissons-les!
Et que toujours sincères et fidèles,
Vivent heureux ces trois couples d'amants,
Qu'il naisse d'eux des rejetons charmants
Qui serviront aux hommes de modèles.
Enivrons-les de bonheur et d'amour;
Que chaque alcôve à son tour soit bénie;
Que leur sommeil, bercé par l'harmonie,
Close leurs yeux jusqu'au lever du jour.
En cadences

Allons, dansons,

Formons des danses

A ces doux sons.

Mme LOUISE COLET.

Si le caractère moral et bienveillant de ces enfants de l'imagination sont en grande partie de la création de Shakspeare, les images qu'il a employées dans la description de leurs personnes, de leurs mœurs et de leurs occupations, ne paraîtront pas inférieures en beauté, en nouveauté et en peinture naturelle, à celles que la magie de son pinceau a répandues sur toutes les autres parties de son monde imaginaire. Ainsi, pour nous donner une idée de la petitesse de ses fées, de quelles minuties pittoresques il a marqué son esquisse, en parlant de l'altercation entre Obéron et Titania, il dit, comme un de ses résultats, que « tous leurs sylphes épouvantés se sauvent, et se » cachent dans les coupes des glands. »

Mais où l'imagination badine et illimitée de notre poëte se déploie de la manière la plus étonnante, c'est dans la description des emplois des fées auprès de leur reine, et dans l'exécution de ses ordres. L'emploi d'un de ses suivants était d'entretenir les riches primevères pour l'embellissement des pensionnaires de sa majesté. Une autre fonction non moins importante était d'endormir leur maitresse sur le sein d'une violette ou d'une rose musquée :

Je connais un berceau semé de thym sauvage:
La violette y croit sous l'odorant ombrage
Du chèvre-feuille en fleurs et des blancs églantiers;

La douce primevère en jonche les sentiers,
Et la rose embaumée y répand ses calices.

C'est là qu'après avoir épuisé les délices

De la danse et des jeux, sous les fleurs aux fruits d'or,

Aux heures de la nuit, Titania s'endort;

C'est là que des serpents la peau s'est dépouillée

Du fragile tissu de leur robe émaillée,
Vêtement dont à peine ils viennent de sortir
Que le corps d'une fée aime à s'en revêtir.
C'est là que de ce suc préparé par mes charmes,
Sur ses yeux endormis j'épandrai quelques larmes.
Bientôt Titania, sous ce philtre puissant,
Sentira se remplir son cerveau frémissant
Des songes odieux, des folles fantaisies

Dont, par cette liqueur, les âmes sont saisies.
Va, prends-en une goutte, et cherche près d'ici
Un jeune homme, un ingrat qui nous résiste aussi,
Qui dédaigne l'amour d'une belle Athénienne;
Va, mets-en sur ses yeux; surtout qu'il te souvienne
De n'opérer ce charme au merveilleux effet,
Que quand tu seras sûr que le premier objet
Que verra son regard, qu'appellera son âme
En s'éveillant, sera cette adorable femme;
Tu reconnaîtras l'homme aux habits athéniens
Dont il est revêtu. Combine tes moyens,
Afin qu'il soit bientôt plus idolâtre d'elle
Qu'elle ne l'est de lui; puis songe,

à tire-d'aile,

A revenir vers nous, avant que le signal
Du jour ne soit donné par le coq matinal.

Mme LOUISE COLET.

D'autres occupations semblables sont décrites avec une imagination encore plus libre, mais avec une plus grande richesse d'images:

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Oh! de ces verts gazons épaississez l'enceinte,
Inclinez sur mon front ces touffes d'hyacinthe

Aux calices d'azur !

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Que je puisse trouver sur ma couche de mousse
De suaves parfums, une ombre fraîche et douce,
Un sommeil calme et pur!

Prenez vos armes d'or, tandis que je repose:
Que l'insecte, caché dans le bouton de rose,
Expire sous vos coups.

Dépouillez de la nuit les peuplades fidèles,
Pour qu'en légers manteaux, le crêpe de leurs ailes
Voltige autour de vous!

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