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parapluie, répondis-je, votre parapluie, pour lequel vous êtes

revenu...

Peut-être, dit-il avec le sourire qui lui était particulier; mais enfin je suis revenu, Pourquoi n'avouerai-je pas que je m'étais arrêté devant la fenêtre? Je vous ai vue vous cacher le visage sur ce coussin, et Carlo vous regardant avec toute la pitié dont un chien est capable... Oui, je suis rentré pour prendre mon parapluie... mais, Augusta, je vous jure que je l'avais oublié exprès. »

Peut-être ne me disait-il pas tout à fait vrai; mais, en le regardant en face, je ne le pensai pas alors, et, bien que vingt ans se soient écoulés depuis notre mariage, je ne le pense pas davantage aujourd'hui.

CH. DICKENS. (All the year round.)

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L'effet produit sur moi par les Sept Étapes de Tyburn ne se borna pas à un attendrissement généreux au bénéfice de l'auteur. Les circonstances si émouvantes de cette pantomime, en m'éclairant sur ma propre situation, me remuèrent jusqu'au fond de l'âme. Lancé sur une mauvaise pente, ne courais-je pas aussi, comme le héros du drame, vers le dénoûment fatal où l'avaient poussé les mauvaises fréquentations? M. George Hopkins ne serait-il point mon mauvais génie, comme Fleur-des-Pois celui de Frank Wildeye ?... Telles étaient les pensées qui m'assiégeaient.

Cependant rien n'était encore désespéré. L'amour de ma mère, - cet amour qui ne s'éteint pas, suivant les mémorables paroles de l'auteur des Sept Étapes, me tendait peut-être une

planche de salut dans la personne du brave Ripston.

J'étais déjà presque résolu à m'y attacher, à lui avouer mon

1 Voir la livraison de janvier.

infamie, en le suppliant de venir à mon secours; mais la honte me retenait. Combattu entre mille impressions diverses, je me sentais plus malheureux que je ne l'avais été de ma vie. Aussi lorsque, au milieu de l'enthousiasme final, mon camarade, qui ne se doutait pas de mes émotions, m'interrogea pour me demander ce que je pensais de la pièce, je lui répondis par un déluge de larmes.

« Ah! grand Dieu! me dit-il, je ne te savais pas si sensible. Il ne faut pas venir au théâtre, si de pareilles rapsodies t'émeuvent à ce point. Veux-tu mon mouchoir? ajouta-t-il en me tendant une espèce de torchon que je n'aurais pas touché du bout du doigt.

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Ce n'est rien, fis-je ; le souvenir de ma mère...

Je comprends. Pauvre Smiff! Mais viens, tout le monde sort et il se fait tard. Il est temps que je rentre chez mon patron. Et toi, de quel côté vas-tu? Y a-t-il loin d'ici à ta boutique? Je ne suis point dans une boutique, répondis-je en baissant la tête.

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Bah! Alors, à quoi travailles-tu?

- Je ne travaille point. »

La confusion que Ripston lut sur mon visage lui fit entrevoir la vérité.

« Je croyais pourtant que tu avais changé; ne me l'as-tu pas dit?

Hélas! j'ai changé, mais en pire,» répondis-je en sanglotant de nouveau.

Il fut si étonné, qu'il s'arrêta court. Je crus qu'il voulait s'éloigner de moi.

Ah! Ripston, je t'en prie, ne m'abandonne pas. Je suis un misérable, mais je me repens. Cette fois, je veux changer pour tout de bon. Ne pourrais-tu m'aider ?

-T'aider, moi ?... Comment?

En m'amenant chez ton patron, qui me prendrait à ton service ou me trouverait une place.

-Ce ne serait pas impossible, dit-il après un moment de réflexion. Viens avec moi, et hâtons- nous, car je suis en retard; nous causerons de tout cela le long du chemin.

D

Pendant ce temps, nous avions suivi la foule, qui s'écoulait,

et nous nous trouvions dans le vestibule du théâtre. Je m'attachai à mon camarade, bien décidé à suivre la voie de l'honnêteté qui semblait s'ouvrir devant moi.

A peine avions-nous mis les pieds dans la rue, que j'aperçus, en face du théâtre, une figure qui me glaça. C'était Georges Hopkins. Appuyé contre un candélabre d'éclairage, il fumait nonchalamment un cigare. Il vint à moi et, mettant sur mon épaule une main familière en apparence, mais sous laquelle je reconnus la griffe de Satan :

Eh quoi! jeune étourdi, me dit-il d'un ton paterne, que démentait également le feu sinistre de son regard, c'est ici que je vous retrouve quand vous savez qu'il déplaît à votre tante de vous voir fréquenter de pareils lieux ! c'est mal. Quant à vous, mon jeune drôle, poursuivit-il en se tournant vers Ripston, si je vous retrouve jamais en compagnie de monsieur Jim, vous aurez affaire à moi. Filez votre nœud, et plus vite que ça. »

Ma surprise fut telle, que je restai comme anéanti. De son côté, Ripston, subjugué par le grand air et le langage impérieux de M. Hopkins, le regardait bouche béante.

Eh bien, mon vieux Smiff, me dit-il finalement, si nous ne pouvons aller ensemble, bonne nuit !

-Bonne nuit, Rip, répondis-je tristement. Peut-être nous

reverrons-nous. »

Le pauvre garçon se mit à trotter dans la direction de Spitalfields, non sans se retourner deux ou trois fois, pour voir ce que je devenais.

Qu'est-ce que c'est que ce vaurien? demanda M. Georges en me tenant toujours par le collet et m'entraînant du côté de son domicile.

-Ce n'est point un vaurien, répliquai-je, c'est un honnête garçon.

Vraiment? alors il n'a rien à faire d'un voleur tel que toi, reprit M. Georges avec ce ricanement infernal que je connaissais. Quelle fantaisie de hanter les honnêtes gens! Tu ferais mieux de songer à tes affaires, qui sont les miennes, comme tu sais. »

La honte, le dépit m'ôtèrent la parole. M. Hopkins laissa retomber sa main, et, mystère incompréhensible, l'empire que

cet homme exerçait sur moi reprit alors toute sa force. J'aurais pu lui échapper, courir après Ripston, dont j'entendais encore les pas lointains; mais je n'y songeai même pas. Je le suivis, tremblant et fasciné, aussi facilement que s'il m'eût mené la corde au cou.

• De quoi parlais-tu avec ton ami? reprit M. Hopkins après un moment de silence.

Du vieux temps où nous étions tous deux vagabonds et où nous couchions sous les voûtes d'Adelphi.

Ah! est-ce qu'il fait encore ce joli métier ?

- Non; il travaille chez un marchand de charbon. -Combien gagne-t-il ?

Dix-huit pence par semaine et sa nourriture.
Dix-huit pence! »

M. Hopkins éclata de rire, cette fois bien franchement.

« Qu'est-ce qu'il fait donc pour gagner d'aussi gros gages?

Il porte le charbon chez la pratique.

C'est-à-dire un métier de cheval du lundi au samedi, tout le long de l'année; tout cela pour dix-huit pence. Savez-vous combien ça fait par an, monsieur Jim?

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-Cela fait trois livres dix-huit shillings. »

Je restai muet. Cette somme, que j'aurais trouvée autrefois assez arrondie, me paraissait misérable à cette heure.

-Savez-vous combien il y avait dans le portefeuille que vous avez volé ce soir? continua M. Hopkins.

-Comment voulez-vous que je le sache? vous ne m'avez pas laissé le temps de compter.

- Il y avait trente livres sterling1. Qu'aurait pensé votre ami, si vous lúi aviez dit que, sans vous échiner comme lui, sans vous noircir les mains, vous gagniez en une minute à peu près autant que lui en dix ans?

- Peut-être eût-il préféré ses dix-huit pence.

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Chacun son goût; mais je crois que vous me récitez la fable du renard et des raisins,

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