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le pays. Les obstacles qui s'opposent à l'extension de cette branche d'industrie viennent du nombre insuffisant de l'animal vivant, conséquence en partie de la réduction de la population irlandaise, en partie des dispositions de la loi des pauvres, qui obligent les classes ouvrières à résider dans les villes. Si on les transportait dans les campagnes, les familles indigentes y auraient chacune leur pourceau, et la richesse du pays, qui se compose de détails, s'en augmenterait. Chaque petit ruisseau apporterait son tribut à la grande rivière commerciale, et le travail du producteur, base de la richesse générale, augmenterait la prospérité du pays entier. Nous ne prétendons pas dire que l'Irlande profiterait d'une façon trèsimportante d'un accroissement dans sa population porcine au point de vue unique du commerce des salaisons, mais nous soutenons que le transport des classes ouvrières des villes dans les campagnes et une plus grande application du travail humain au sol seraient des mesures essentiellement rémunératrices, et qu'il en résulterait une notable augmentation des produits alimentaires, ce grand but de l'agriculture.

0. S. (Fraser's Magazine.)

Dans la relation de notre voyage en Irlande, nous n'oubliâmes pas la statistique de la race porcine, et nous décrivîmes le grand établissement de salaison que tous les touristes vont visiter à Limerick, celui de M. Russell, qui emploie deux cent cinquante ouvriers, charcutiers, cureurs et saleurs. C'est un spectacle digne de Gargantua que de voir dans cet établissement plus de quinze mille jambons suspendus en attendant l'exportation. On admire surtout, chez ce saleur grandiose, une maison ou caserne spécialement réservée aux rats. « Il faut que tout le monde vive, semble, au premier abord, être la brahminique maxime adoptée par M. Russell. Vous qui n'en voyez pas plus la nécessité pour les rats que ne la voyait le cardinal de Richelieu pour les poètes faméliques, sachez que M. Russell a la perfidie de traiter les rats comme vous traitez vous-même les moutons, comme M. Russell

traite lui-même les pourceaux... Il les parque pour les égorger à l'heure utile, excepté qu'il ne les sale pas, quoique ce fût peut-être une idée que de saler les rats pour les exporter en Chine. La caserne aux rats de M. Russell est percée de trous à entonnoir, par lesquels trous les rongeurs peuvent s'introduire librement dans la cour et s'y nourrir des débris qu'on y jette exprès pour qu'ils ne songent pas à aller attaquer les jambons. Mais, tous les trois mois, une planche fatale tombe devant les issues extérieures de l'immense ratière. Les rats se réfugient dans des cellules intérieures qu'on leur a ménagées à dessein, cellules si étroites, qu'ils ne peuvent s'y blottir qu'en laissant passer leur queue. Un employé de M. Russell tire chaque rat par l'appendice caudal, et en remplit un baril qui devient le cercueil commun.

(N. D.)

INDUSTRIE.-BIOGRAPHIE.

LA LÉGENDE DES INVENTEURS.

X1

Jacob Snider, l'auteur du fusil à aiguille anglais.

Que n'a-t-on pas dit, que n'a-t-on pas écrit sur les luttes du génie, les déceptions et les tribulations des inventeurs, sur l'injustice et l'ingratitude dont ils sont les martyrs? Il y aurait eu là matière à plus d'un roman, sans la difficulté de la tâche qui suppose chez l'écrivain une connaissance plus familière des détails inhérents à une découverte que n'en peuvent avoir d'ordinaire les romanciers. Lord Lytton, dans son Dernier des Barons, a tenté l'épreuve, et, pour les hommes spéciaux, il a échoué. En voulant exposer les principes du calorique latent, pour rester dans la vraisemblance de son sujet, il na réussi, malgré son talent, qu'à faire voir qu'il n'avait pas fait une étude suffisante de la question dont il avait voulu s'emparer. Charles Dickens n'a guère été plus heureux dans une tentative analogue. Celui qui s'est peut-être le mieux tiré d'affaire dans une œuvre d'imagination, c'est Balzac pour sa Recherche de Fabsolu; son alchimiste ne choque pas les idées scientifiques par la simple raison que le point à découvrir n'était pas défini, la transmutation des métaux étant alors comme aujourd'hui lettre close pour tout le monde.

1

Jacob Snider est mort; il repose depuis quelques mois dans

Voir, pour les articles précédents de cette légende biographique, les livraisons de 1865 et 1866.

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le cimetière de Kensal Green, sous cette couche froide que tant de fois dans ses moments de misère il appela « le maudit sol britannique. La presse quotidienne, qui d'abord nia sa maladie, et plus tard dénonça son infortune en termes pathétiques, alors qu'il n'était déjà plus temps d'y porter remède, s'est contentée d'enregistrer tout simplement son décès. Son nom même semble s'effacer déjà des mémoires, ainsi qu'il en est de tant d'autres inventeurs morts et enterrés. Enfield retentit du bruit des machines qui forgent et fabriquent ses fusils aujourd'hui célèbres, et cela jour et nuit, fêtes et dimanches, sans interruption. Lui, l'inventeur, il a été frappé juste au moment où, après sept longues années de labeur et de lutte, son œuvre était achevée. Il est mort misérable et endetté. Il avait eu foi dans l'honneur de l'Angleterre, et pour lui l'Angleterre a manqué à l'honneur.

Comme pour ne laisser aucune prise contre sa mémoire, rien qui pût servir de prétexte à l'orgueil britannique pour excuser son honteux abandon, Jacob Snider était une nature en quelque sorte exceptionnelle, n'ayant aucun des défauts que d'ordinaire on reproche aux inventeurs. Il était prévoyant et économe, scrupuleusement exact dans ses comptes, fidèle à tous ses engagements. Il n'y avait en lui rien d'imprudent, rien de désordonné. Dans tous ses marchés, quels qu'ils fussent, il était l'esclave de sa parole. Cela posé, il est permis de demander comment le gouvernement de la grande nation anglaise pu traiter un inventeur qui travailla avec ardeur pour ce gouvernement, qui mérita bien de lui, qui pendant longues années souffrit pour lui, se fit esclave pour lui, s'imposa pour lui les plus dures privations et finit par mourir pour lui, comment, disons-nous, ce gouvernement a pu traiter cet inventeur moins libéralement que n'eût fait un simple entrepreneur ou manufacturier.

Mais, de son côté, puisque Snider était si plein de prévoyance, pourquoi n'a-t-il pas fait avec le gouvernement un marché qui eût servi le but auquel il visait? Telle est la question que ne manquera pas de faire le public, le public, mais non les inventeurs. Ceux-ci savent bien que le gouvernement anglais ne s'engage jamais. « Fiez-vous-en à notre honneur, dit le gou

vernement; nous ne voulons pas entendre parler de conditions. »

Ce n'est point ici une métaphore, c'est la vérité dans son sens le plus tristement littéral. L'histoire de Snider montrera ce qu'il faut ou non entendre par l'honneur de l'Angleterre en ce qui regarde les inventeurs.

L'issue du procès Feather contre la couronne a démontré le droit légal absolu du gouvernement britannique de prendre toutes les inventions que bon lui semble, de les prendre sans avis, sans traité, sans compensation pour l'inventeur, pour le public ou qui que ce soit, de les prendre absolument pour rien si tel est son bon plaisir. Cette décision n'est-elle pas la doctrine toute simple que pratiquait Rob-Roy? diffère-t-elle beaucoup des procédés de Jack Sheppard? Quand Snider vint pour la première fois en Angleterre, en 1859, la loi était toute différente. Depuis lors, l'interprétation a changé. Snider était prudent, et son journal, très-exactement tenu, prouve qu'en traitant avec le gouvernement anglais il prit toutes les précautions qu'un homme prudent pouvait prendre. Mais, sous les auspices de quelque Bismark homme de loi, une campagne s'organisa contre le génie inventif des Anglais, et le silence de la désolation se fit dans le camp des inventeurs. Le pauvre Snider murmura tout bas comme les autres, la nation anglaise n'entendit pas les plaintes des victimes, et leurs cris, perdus dans le désert que les juges avaient fait autour d'elles, furent appelés le silence de la paix.

Tandis que les Anglais chantaient par-dessus les toits les mérites du canon Armstrong, « l'artilleur, jadis homme de loi,» sir William Armstrong, découvrit tout à coup, lui, qu'il restait encore quelque chose à faire. Sur le papier, sinon sur le champ de bataille, le canon Armstrong était parfait. Les journaux anglais exprimaient leur admiration quotidienne. John Bull était glorieux. Il n'y avait que John Bull au monde. Rule britannia! Vive sir William vive la houille britannique! vive le fer britannique! Courage britannique, honneur britannique, découvertes britanniques! tout était britannique, la France était annihilée, les Français n'avaient plus pour eux que la honte. « Le canon Armstrong, écrivaient les journaux des Trois Royaumes, com

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