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efté endommagez par la longueur, & difficulté du voyage.

L'eau de la riuiere eft mal faine, pleine de crocodilles & de diuerfes efpeces de poiffons. Le peuple bazané, mal faisant, fans barbe, les cheueux vnis, & pendans, fors en temps de guerre qu'ils les cordelent, de peur qu'ils ne leur nuifent eftans au combat. L'air y eft fort intemperé, les hommes grands, & bien proportionnez, ils font circoncis, & neantmoins n'ont iamais oüy parler de la loy de Moyfe, n'y ayant aucun temple, ny mofquée en toute l'ifle, ils ne connoiffent point Dieu, finon qu'ils le craignent fans l'adorer, ny le prier; difant que le Diable, leur enuoie des maladies, mais que Dieu les tuë. ils croient pourtant l'immortalité des ames, & racontent que le Ciel eft faict pour les receuoir indifferemment, apres qu'elles auront quitté leurs corps.

Comme nons eftions à vn grand village à la droitte de ceux qui defcendent la riuiere, qu'on nomme Doulce, à trois quarts de lieues de la baïe, fept maistres des villages voifins des Machicores, fuiuis de cin-. quante hommes nous amenerent quarante. bœufs, qui auoient les cornes hautes de deux pieds ayans vne loupe fur le mouuement des efpaules, & vne fois auffi gros & hauts queles

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noftres; ils nous apporterent auffi des toiles de coton raiées de foie,m'offrans d'en trocquer tontre ma marchandise, mais comme ils ne vouloient que des longues cornalines, & grenats de Venife de couleur de citron, qu'ils appellent Vaques, & les Tapates Ets-ets, & que i'en manquois, ie ne fis pas grand trafic auec eux, n'ayant pris que quinze bœufs, qu'ils m'abandonnerent pour des chaifnettes de leton blanc, & des faulces perles. Ils me firent auffi prefent de fix morceaux de fang de dragon, chacun long de trois poulces, reffemblans à des troncs de boudin, marbrez comme le fauon d'Alican, de rouge, noir, & blanc, ils appellent ce fang de dragon Auly harre, qui eft à dire, onguent pour eftancher le fang: en recompence de ce ie leur donnay du petit coral, & parce qu'ils difoient que ces morceaux fe faifoient de fueilles pillées venans de certains arbres qui eftoient fur le port fainct Auguftin, ie fis prefent à vn d'eux d'vnpetit chapelet de coral, à condition de me faire voir de ces arbres. Il me mena dans vn bois qui n'eft .qu'à deux portées de fuzil de la baïe, où il me fit voir parmi des espines & buissons, vn * arbre fort branchu, & gros comme vn *Il y a ie ne fçay poirier, les fueilles longues, mais plus eftroitque celles du laurier, ayant vne odeur de

quoy de femblable à eccy dans Amatus,

tes

Itu. de Diofcoride,

dit, mais fans tef

gons, & Dracona

rouges & luion touche quelque

qu'on nomme cette

gon, en quoy il ne

violette de Mars, les fleurs font blanches, & Lufitanus, fur le s. tref odoriferantes,venans en bouquet, ron- narration 69. où il des & n'ayans que cinq fueilles bien ordon- moings qu'il y a de nées, elles se ferment la nuict, & ne font pas grands arbres és Caplus larges qu'vn double: du milieu d'icelles dere, appellez Drafort vn petit nerf, ou filet rougeaftre qui fe ries, qui iettent des recoquille en telle forte, qu'il faict la figu-fantes, defquelles, fi re d'vn dragon. Ces fleurs pillées & mifes chofe, il paroift vne dans les trous des cannes, font ces morceaux rougeur noiraftre, & desquels ie viens de parler; apres auoir efté goute, fang de drafechées au foleil & les cannes, ou rofeaux s'accorde pas auec qui les enfermoient.caffez. Voila comme se fait le fang de dragon, duquel les drogui-Vois Matthiole fur ftes & les arboriftes parlent tout autrement. I'en fouuent vfé tres-vtillement à retancher le fang, & fuiuant l'experience que i'en ay veu faire aux Machicores, i'ay arrefté les flux de fang, par fumigations, mettant de cette drogue fur le feu, & en faifant receuoir aux malades la fumée d'icelle par le fondement.

ay

Au bout de fept iours que ie fus à la baïe sainct Augustin ie m'en retournay à Mannhale, lieu de ma demeure,faifant conduire mon bestail deuant moy; mais au cinquiefme iour, comme l'entrois en la prouince des Tapates, me trouuant fi las & recreu,que ie ne pouuois plus marcher, ie montay, iambe deçà, iambe delà, fur celuy de mes bœufs,

mon autheur,

Diofcoride 1.5.c.69.

que ie creu le plus docile. Ma coniecture ne me trompa pas, il me porta doucement par tout, ie paffay fur luy les riuieres, portant mon paquet deuant moy. Ce fut vn cftonnement fi grand aux Tapates de me voir en cet equipage, qu'ils me croioient plus qu'hōme,dauoir eu la hardieffe de monter fur vn bœuf, ce qu'ils n'auoient iamais veu, ny ozé entreprendre.

Estant entré dans la prouince de ces Tapates, vn d'eux me montra vne harquebuse, vne banderolle, & les fournimens pleins de poudre, & dans la gibeciçre du plomb & des pierres d'arquebufes, & de fuzil. D'autres des. piftolets, & d'autres quantité de vaiffelle d'eftein & de cuiure, ie fçeu d'eux, que tout cela venoit d'vn nauire Hollandois,qui naguieres auoit fait naufrage entre port fainct Augustin & le Cap de fainct Iulian, & que ceux qui l'auoient leué en auoient trocqué vne bonne partie auec eux. Ie troquay mon arquebufe auec le premier qui me donna la fienne, vn bœuf vne vache & pot deftein de retour. Les autres ne voulurent rien tro

«quer, faisans grand eftat des chauderons, poiles, plats, & affiettes qu'ils auoient.

N'ayant rien affaire dans ce païs ie me rendis dans ma maison au village de Mannhale au commencement du mois de Feb

urier

urier mil fix cent quarante deux, où ie vis faire les ceremonies publiques de leur circoncifion, comme il s'enfuit.

Tous les maiftres des villages fubiets d'Andianmachicore,vindrent vers luy prendre iour à bastir vne maison pour y circoncire leurs enfans mafles nez depuis trois ans, cette ceremonie ne se faisant que de trois en trois ans. Pendant lequel temps tous ces enfans ne mangent point d'œufs iufques à ce qu'ils foient circoncis. Le iour arrefté, chacun alla couper du bois pour baftir cet edifice au milieu du village de Mannhale,proche la maifon d'Andianmachicore leur feigneur, qui releue pourtant d'Andianramac fon beau pere, Roy des Malegaffes. Ils poferent des perches qu'ils apporterent fur leur dos, fur des pilliers de bois; & fur ces per ches ils en mirent d'autres à guife de cheurons pour fouftenir des grands ioncs comme piques qui feruent de trauerfiers, couuerts de grandes fueilles de balifiers, appel

lez par eux raues, qui s'auançans les vnes fur les autres, comme nos thuilles, & ardoises, donnent vne pante à la pluye, empefchant l'eau d'entrer dans leur edifice, lequel eftant acheué, est garni de gros pieux par le déhors tout autour,pour empefcher que le beftail ny entre. Cette maifon eftoit à iour,

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