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donné pour chambre celle des canoniers, il
nous dit adieu auec larmes & soupirs, en
nous embrassant tendrement, ie croi qu'il
prefageoit la mort, car il mourut en l'isle
fa
de Rez fix mois apres fon depart; fans en-
trer en fon païs.

Il auoit laiffé à ma charge, & à celle de Sebastien Droüard le refte des marchandifes, qui eftoient au magazin, à condition d'en tenir conte à la Compagnie, & remettre icelles és mains de ceux qu'elle m'en¬ uoyeroit dans deux ans. Et où il ne viendroit de fa part dans ce temps aucun vaiffeau de France, pour les charger, qu'elles me demeureroient en propre, pour en faire ce que bon me fembleroit.

Et comme le vaiffeau qui fortoit pour la France, eftoit fuffifamment chargé, & qu'il y auoit des gens peu affectionnez audit Gou-, bert noftre Capitaine, on laiffa dans l'ifle,de leur confentement, Jacques du Val, Abraham le Gaigneur, & Isaac Meldron, tous trois de Dieppe:cè dernier fut quelque temps apres maffacré par le commandement d'An-. dianrafo, baftard d'Andianramac.

Auffi toft que le Prince Andianmachicore gendre d'Andianramac, fçeut le depart de nos vaiffeaux, il nous vint trouuer auec fa femme, & deux cent tant hommes que

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femmes pour nous prier d'aller loger en fon village, ce que Sebastien Droüard, & moy luy auions promis, lors que nous estions chez luy, pour auoir du rafrechiffement, & de la volaille pour nos malades, qui eftoient au port de faincte Luce. Ce peuple demeura huict iours auec nous, pendant lequel temps, Andianmachicore fit baftir vn village proche de noftre magazin, où il mit des familles de Negres pour le garder, & nous aduertir, de ce qui fe pafferoit en ce lieu, & des vaiffeaux qui arriueroient au port, lors que nous ferions plus auancez dans l'ifle, du cofté du Sud, à la pointe d'icelle, qui eftoir le lieu de la demeuré d'Andianmachicore, qui releuoit, de mefme qu'Andiaferon & autres, d'Andianramac leur fouuerain.

Le village acheué fut nommé Amparouge où on laiffa douze familles de Negres auec du beftail, & quantité de ris que nous leur donnafmes pour viure. Andianmachicore fort fatisfait de la defpoüille de noftre grand nauire,les ferremens duquel pour la plus part - demeurerent pour luy & les fiens, fit porter tout noftre ballotage, & outils par les Negres que nous fuiuions dans fon village, appellé Mannhale,qui eftoit efloigné du port faincte Claire, ou Ytapere, de douzes grandes lieuës, fciz à la pointe de l'ifle du cofté

du Sud à deux lieuës de la mer, où eft vn port que nous appellons aux gallions, parce qu'autrefois vn gallion d'Efpagne y feiourna long temps, attendant que la tempefte, qui l'auoit pourfuiui, fut appaisée.

Eftant arriuez à Mannhale ce Seigneur nous donna la maifon de fa mere, qu'il fit paffer en la fienne,iufques à ce que nous en euffions bafti vne à noftre volonté: nous eftions cinq, qui mifmes de la marchandife en bloc autant l'vn que l'autre, pour viure & trafiquer enfemble. Ifaac Meldron alla trafiquer du cofté de Fanzaire,& moy de celuy des Tapates & Machicores. Nous amenafmes des prouifions de bouche, bœufs, moutons, cabrils, & chapons, viuans en bonne intelligence l'espace de fix fepmaines. Mais comme nous eufmes reconnu que Meldron auoir caché chez vn Negre quarante liures de cire, pour en faire fon profit particulier,nous partageafmes la marchandise que nous auions mife en commun. Ledit Meldron & Iacques du Val fe retirerent à Fanzaire principal village d'Andianramac, qui eftoit fouuerain en ces contrées. Sebastien Droüart, Abraham le Gaigneur, & moy demeurasmes à Mannhale.

Et comme i'euffe pris refolution de m'en aller par terre, fuiuant la cofte du cofté du

que

Leuant, d'vn bout de l'ifle à l'autre, qui regarde le Nord, Droüart & le Gaigneur m'ayans conduits à quatre lieuës plus haut le port de fainete Luce,prirent congé de moy, & me laifferent auec vingt Negres, vn maistre de village, & vn domestique d'Andianmachicore, qui m'auoit donné tout ce monde pour la feureté de ma perfonne, & de la marchandise que ie faifois porter par fondomestique, le nom duquel eftoit Diambo.

Eftant à vn village qui appartenoit à vn nommé Diamboule, fubiet d'Andianramac, on m'aduertit que i'auois quatre iournées à faire sans trouuer aucun village, ce qui fut cause que ie me pourueu de viures pour moy & mes gens.

Au bout des quatre iours, nous arriuasmes en vn autre village commandé par vn Noir, ayant les cheueux longs, appellé Dianzore: il y auoit en ce lieu grande refiouïffance, pour la iuftice qu'on venoit de faire de deux larrons de bœufs, defquels nous vifmes les mains fichées dans les pointes des pieux qui fermoient le parc, où on retiroit les bœufs. Chacun auoit fait du vin de fucre, & comme on en beuuoit largement, Dianzore nous ayant logez en vne fienne maison, nous en fit porter, & nous dit, qu'il auoit defia trop beu,qu'il nous parleroit le lendemain,&pour

empefcher fes gens, qui eftoient yures de nous quereller,illes fit tous defarmer: le lendemain, il nous fit encore apporter du vin, des racines, des chapons, & du ris, & vint boire, & manger auec nous.

Ayant pris congé de luy, nous tirasmes à la prouince des Matatanes, fuiuant toufjours les bords de la mer, où nous y arriuafmes trois iours apres, ayans paffé par trois grands villages,feparez l'vn de l'autre enuiron cinq lieues, & comme nous estions au fecond village, nous fufmes estonnez de voir que ceux que nous allions vifiter, aduertis de noftre venue, nous y apporterent quantité de viures de la part d'Andiampa lola leur Seigneur, lefquels nous receufmes pour ne sembler le mefprifer, encore que nous n'en euffions aucun befoin.

Nous arriuafmes deux iours apres, tant ceux de mon escorte que ceux qu'on nous auoit enuoié fur le riuage d'vne grande riuiere, qu'on nomme Vinangue, qui sert de limité à laditte prouince des Matatanes; & au lieu où nous eftions, on decouuroit dixfept grands villages fciz fur ledit riuage, ombragez de plufieurs bananiers, & abondans en cannes de fucre.

A peine estions nous arriuez, que le plus grand Prince des Matatanes, que nous auons

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