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la fureur des duels affaiblit ce qui restait de la seconde aristocratie. Enfin sous Louis XIII et sous Louis XIV les gentilshommes ou servirent dans des corps privilégiés réputés nobles, ou devinrent les officiers de l'armée nationale. Dans cette nouvelle position ils ne manquèrent point à leur renom : les batailles livrées par Condé et par Turenne attestent que, si le gentilhomme avait changé de fortune, il n'avait pas dégénéré de valeur. Aux champs de Cloterscamp et à ceux de Fontenoi, sous Louis XV, dans la guerre d'Amérique, sous Louis XVI, la France n'eut point à rougir des d'Assas et des Lafayette. Quant au commencement de la révolution, il ne resta plus au pauvre gentilhomme, redevenu Franc, que son épée, il l'alla porter aux pieds de ceux qui, selon ses idées, avaient le droit d'en requérir le service. Si ce fut une faute, ce fut celle de l'honneur; et puisque la noblesse devait périr, mieux valait qu'elle trouvât sa fin dans le principe même qui lui avait donné la vie. Peu après éclatèrent les merveilles de l'armée plébéienne. Aujourd'hui si la France parvient à généraliser le système des gardes nationales, elle détruira celui des armées permanentes; elle rétablira les anciennes levées en masse des communes; les convocations du ban et de l'arrière-ban plébéiens

remplaceront les convocations du ban et de l'arrière-ban nobles; la démocratie fera ce qu'avait fait l'aristocratie. »>

« A Crécy, dit M. Michelet, toute la chevalerie était là réunie, toute bannière flottait au vent, ces fiers blasons, lions, aigles, tours, besans des croisades, tout l'orgueilleux symbolisme des armoiries. Les brillantes bannières furent cachées ce jour-là. Le symbolisme armorial perdit tout son effet. On commença à douter que ces lions mordissent, que ces dragons de soie vomissent feu et flamme. La vache de Suisse et la vache de Galles semblèrent aussi de bonnes armoiries (1). >>

Sans l'étude approfondie de l'histoire d'Angleterre et de l'histoire de France, comment comprendre ces deux grands pays qui ont dominé tour-àtour l'Europe et le monde?

Les sciences sociales ne peuvent être étudiées d'une manière vraiment profitable qu'à l'aide de l'histoire. Ce grand dépôt de toutes les expériences politiques renferme seul des exemples propres à nous éclairer sur les moyens d'arriver au double but que doit se proposer tout gouvernement, celui de rendre les hommes heureux et de les rendre en

(1) Après la bataille de Poitiers, dit Froissard, il restait peu de nobles à qui on pût avoir recours.

même temps meilleurs. La brièveté de notre vie, l'impossibilité où nous laisse notre faiblesse de comprendre d'un coup-d'œil toutes les conséquences d'un seul principe, rendent les théories dangereuses en matière de gouvernement, si nous ne les appuyons sans cesse sur des faits, si nous ne les rectifions avec leur aide. D'autre part, il est vrai, beaucoup de causes influent simultanément sur le même fait, et ceux qui se suivent n'étant point souvent la conséquence l'un de l'autre, l'étude des faits, sans philosophie, ne serait pas moins décevante que celle de la philosophie sans faits. Pour tirer quelque avantage de l'histoire, nous devons sans cesse expliquer et coordonner les événements à l'aide des principes, tout comme nous devons découvrir les principes dans l'enchaînement des évé– nements, et les développer par l'étude pratique de 'eurs résultats. Aussi l'histoire appelle l'homme qui sit réfléchir à l'exercice le plus constant et le plus sublime de sa pensée; elle fait naître pour lui les grandes vérités morales du choc des révolutions; l'étncelle philosophique brille à travers la nuit des tems, et sa vive clarté pénètre dans les profondeurs du caos. Tout-à-coup cette lumière fait reconnaître l'nchaînement des incidents qu'on avait crus isolés on voit naître dans les cœurs les nobles ac

tions; on voit d'autre part les grandes erreurs en politique ou en religion étendre leur ombre sur des siècles tout entiers. Mieux l'histoire nous fait comprendre l'homme, plus nous jugeons avec indulgence ses fureurs et ses erreurs, car presque toujours elle nous montre que leur cause est bien loin en arrière de lui. Mais elle nous apprend aussi à nous attacher avec ardeur à ce qui est vrai en principe, à ce qui est pur en morale, parce qu'elle nous fait voir combien d'esprits sont faussés, combien de cœurs sont corrompus par de détestables institutions politiques, parce qu'elle met au grand jour le crime que commettent contre l'humanité ceux qui ôtent tout frein au pouvoir, ceux qui font de la religion un instrument politique, ceux qui, changeant les citoyens en sujets, détruisent en eux et le lien du devoir et l'amour de la patrie. Sous ces rapports divers, l'histoire de France ne le cède à aucune autre en utiles leçons (1).

Que faut-il donc savoir pour comprendre ou d riger la France? Son histoire. C'est là qu'on aprend les principes, les idées, les sentiments qui l'entraînent et l'entraîneront toujours, et qui ont le fond de son existence, la raison de ses acions

(1) Sismondi.

et de sa conduite. Tout ce qui se fait contre ces principes, ces idées et ces sentiments, produit les antipathies des citoyens contre le gouvernement, et amène des révolutions qu'on aurait aisément prévenues en ne heurtant pas le caractère national.

Les nations ont en effet, comme les personnes, un caractère moral, une sorte d'inclination native qui se retrouve dans toute la durée de leur histoire (1). L'égalité et la liberté politique sont les traits caractéristiques de la nation française. Ces traits se montrent à son origine comme le chêne dans le gland, ils ne cessent de se développer dans la suite des âges. A l'époque où nous sommes arrivés, au treizième et au quatorzième siècle, la vie qu'on remarque dans les communes de France est le mouvement imprimé par ces deux passions des Français. Tout a servi ce mouvement, rien n'a pu l'arrêter, la féodalité, le pouvoir royal, l'hérédité, les croisades, les guerres contre les Anglais, l'ancien régime et la révolution de 1789.

(1) Un corps moral, comme un autre corps, ne peut prospérer qu'autant qu'il est régi et qu'il se développe conformément à sa constitution naturelle. Il n'est pas même besoin de contrarier essentiellement la nature d'une institution pour faire naître une cause de dissolution, il suffit qu'elle soit régie d'une manière moins naturelle.

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