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tèrent la France, et il fallut des siècles pour les éteindre. Ce fut pendant le règne de Charles-le-Bel, que s'établirent à Toulouse les jeux floraux, espèce d'académie qui eut un grand éclat, à une époque où les véritables gens de lettres étaient très-rares. Elle fut fondée par sept poètes provençaux, qui prirent le titre de gaie société des sept torbadors. Ils décernèrent chaque année une violette d'or à l'auteur qui leur avait présenté la meilleure pièce de poésie. Le premier qui obtint la joya violetta fut Arnaut Vidal, de Castelnaudary (4).

(1) Les jeux floraux furent institués avant Clémence Isaure. Voici ce que dit M. de Marchangy:

« Clémence Isaure, riche héritière des comtes de Toulouse, naquit au milieu du quinzième siècle; elle aimait les lettres, et dota de ses bienfaits le collége de la GaieScience de Toulouse, où l'on décernait annuellement les fleurs du savoir; en sorte qu'on la regarde généralement comme la fondatrice des jeux floraux. Cependant, l'institution des jeux floraux existait longtemps avant cette fille célèbre, ainsi qu'il résulte des registres de la ville de Toulouse. Plusieurs auteurs ont contesté l'existence de Clémence Isaure, et ont traité de fable tout ce qu'on a écrit sur elle. M. Lacurne, dans un discours prononcé au conseil de la ville de Toulouse, prétendit faire prévaloir cette opinion et prouver que la ville de Toulouse et les capitouls pouvaient seuls revendiquer l'honneur d'avoir fondé et enrichi l'institution des jeux floraux. Il est vrai que Caseneuve, dans son Traité de l'origine des jeux floraux, ne dit rien de Clémence Isaure; que Laloubère semble hésiter à reconnaître cette bienfaitrice des poètes toulousains, et que Lafaille et Catelle ne lèvent point ces doutes; mais le silence que gardent ces écrivains est bien suffisamment compensé par les mille et mille autorités qui garantissent la munificence et le mérite de la fille des comtes de Toulouse. Jean Bodin, Drandius, M. de Thou, Pierre Dufaur, Alexandre Bodeurs, poète écossais (dans un Recueil de poésies latines), Papire Masson, Godolin, Barthélemy de Gramont, du Boulay (Histoire de l'Université de Paris), parlent tous avec plus ou moins d'étendue de Clémence Isaure, et la regardent ou comme la fondatrice ou comme la bienfaitrice des jeux floraux. Mais ce qui parle encore mieux de l'existence de cette femme célèbre, c'est sa statue, placée par les capitouls dans le grand Consistoire de Toulouse; c'est l'inscription gravée au pied de cette statue, et dans laquelle vit l'éternel souvenir de ses bienfaits; c'est le mausolée qu'on lui érigea au temple de la Daurade, et qui ne disparut qu'en 1549; c'est cet usage dont la tradition subsiste encore, et qui entraînait le peuple de Toulouse sur ce tombeau célèbre pour y répandre des roses; c'est, enfin, un grand nombre de délibérations solennelles, d'actes authentiques et d'éloges prononcés en public, qui tous ont pour objet de constater les ver

CHAPITRE IV.

De l'état de la France depuis la mort de Philippe IV, dit le Bel, jusqu'à celle de Charles IV, dit le Bel.

A la mort de Philippe-le-Bel, tous les ordres de l'État, dit Condillac, et même toutes les provinces, portaient avec impatience un joug qui s'était appesanti sur toute la nation. Le mécontentement était général; mais chacun se plaignait séparément, suivant ses intérêts particuliers; et il ne pouvait y avoir d'accord entre le clergé, les seigneurs et le peuple, puisque, toujours divisés, ils n'avaient jamais cessé de se nuire: voilà ce qui maintint l'autorité royale. Il faut convenir qu'un ́ souverain qui se rend odieux, a besoin de diviser les ordres de l'Etat. Les règnes faibles et courts des trois fils de Philippe-leBel, qui montèrent successivement sur le trône, étaient un temps bien favorable à une révolution. Si les trois ordres avaient voulu se réunir, il leur aurait été facile de mettre des bornes à la puissance du monarque, et de recouvrer une partie de leurs droits; mais comme ils agissaient chacun séparément, ils menaçaient plutôt de se soulever, qu'ils ne se soulevaient, et, parce que dans cette position ils sentaient leur faiblesse, chacun d'eux saisissait l'occasion de traiter avec le roi; ils se soumettaient tour-à-tour, souvent sur des promesses vagues, dont rien n'assurait l'exécution. Si les seigneurs, par exemple,

tus, les talents, les bienfaits de Clémence Isaure. Benoît, jurisconsulte, conseiller de Toulouse en 1500, parle, dans la deuxième partie de son ouvrage, des bienfaits de Clémence Isaure. Par les statuts des jeux floraux, son éloge doit être prononcé annuellement. Cette obligation fondamentale a donné naissance à une volumineuse collection d'éloges. Antoine Vinhalibus prononça le premier en 1526, et depuis on en composa chaque année. »

demandent que les baillis soient destitués, lorsqu'ils auront entrepris quelque chose contre les coutumes établies, le roi l'accorde; mais c'est en insérant pour clause, que les coupables ne perdront pas leur emploi, s'ils ont agi de bonne foi, ou s'il veut leur faire grâce: il n'accordait donc rien. D'ailleurs, il était bien difficile de déterminer ce que c'étaient que les coutumes établies. Les seigneurs obtinrent encore, comme une faveur, que le roi enverrait tous les trois ans des commissaires dans les provinces, pour réformer les abus commis par les baillis; ils ne prévoyaient pas que les réformateurs, étant officiers du roi, s'occuperaient uniquement des moyens d'accroître l'autorité royale.

Ainsi, toutes leurs précautions tournaient contre euxmêmes, tant ils étaient ignorants des droits qu'ils avaient eus, de ceux qu'ils conservaient encore, et de ceux qu'ils étaient menacés de perdre. Leur aveuglement ne fut pas malheureux pour la France; car, avec plus de lumières, ils auraient pu ramener tous les désordres du gouvernement féodal.

Une autre cause contribuait à mettre les seigneurs assujettis dans l'impuissance de se relever. Les Etats-Généraux, établis par Philippe-le-Bel, avaient partagé le royaume en deux parties: parce que les ducs de Bourgogne, d'Aquitaine, de Bretagne, et le comte de Flandre, ayant négligé de se rendre à des assemblées, où ils n'étaient appelés que pour contribuer, s'accoutumèrent à se regarder comme étrangers à la France, la France les regarda bientôt comme ennemis. Ils auraient du prévoir que la ruine des barons entraînerait tôt ou tard la leur; il était donc de leur intérêt de les protéger, et, par conséquent, de se rendre aux Etats. En tenant une conduite différente, ils s'exemptèrent, à la vérité, de porter les charges,

mais ils aigrirent contre eux les barons qu'ils abandonnalent Ils croyaient sans doute avoir gagné beaucoup, parce qu'ils n'avaient pas été assujettis comme les autres, et que le roi në conservait sur eux que les droits de suzerain; cependant, ce suzerain devenait bien redoutable, puisqu'il était monarque dans tout le reste du royaume, et qu'il n'y trouvait qu'une faible résistance à ses ordres. Tel a été l'état de la France sous les fils de Philippe-le-Bel.

Louis X, dit Hutin, ayant succédé à son père, apaisa les mécontents, en faisant des promesses aux grands qui revenaient à lui, et en sacrifiant à la haine publique Enguerrand de Marigni, qui avait été ministre de son père, et qui fut pendu pour des crimes qu'il n'avait pas commis.

Ce prince ensuite surchargea le peuple d'impôts, vendit les offices de judicature, leva des décimes sur le clergé et excita les serfs de ses terres à racheter leur liberté : ce sont les moyens qu'il imagina pour fournir aux frais de la guerre qu'il voulait faire aux comtes de Flandre. Il fit en effet cette guerre, mais sans succès; il mourut la seconde année de son règne. Un édit, par lequel il déclara que le droit de battre monnaie n'appartenait qu'à lui, fait voir combien Philippe-leBel avait enhardi ses successeurs à dépouiller les barons.

Les seigneurs, avides de saisir les occasions de faire de l'argent, vendirent, à l'exemple de Louis-le-Hutin, la liberté de leurs serfs. Les serfs différaient des esclaves, en ce qu'ils avaient du pouvaient avoir des terres ou d'autres biens en propre; mais ils étaient attachés à la glèbe, comme on s'exprimait alors, c'est-à-dire, qu'ils ne pouvaient point sortir du domaine de leur seigneur, qui exerçait sur eux une puissance arbitraire.

Les seigneurs, en affranchissant les serfs de leurs terres, firent par avarice une fausse démarche contre leur pouvoir; car ces hommes qu'ils avaient vexés jusqu'alors, devaient devenir leurs ennemis en devenant libres, et chercher, par conséquent, dans la puissance du roi, une protection contre

eux.

L'édit par lequel Louis-le-Hutin s'était attribué à lui seul le droit de battre monnaie, trouva tant de résistance, que ce prince avait été obligé de se borner à prescrire aux barons le poids, le titre et la marque des espèces qu'ils fabriquaient; mais, bien loin d'observer ses réglements, ils avaient affaibli les monnaies, ils avaient même contrefait celles du roi, et la fortune des particuliers était à la discrétion de ces tyrans aveugles qui ruinaient leurs sujets, sans songer qu'ils se ruinaient eux-mêmes par contre-coup.

Philippe-le-Long, voulant arrêter le désordre, envoya des commissaires dans toutes les provinces pour examiner la conduite des seigneurs et pour les forcer à se conformer aux réglements. Le roi d'Angleterre ne fut pas exempt de cette recherche; car on saisit à Bordeaux et dans toute la Guyenne ses coins et les espèces qu'il faisait fabriquer.

Un prince qui commandait ainsi, n'était pas bien loin d'enlever aux barons le droit de battre monnaie; mais, pour y trouver moins d'obstacles, il crut devoir traiter avec les plus puissants. Il acheta donc de Charles son oncle, comte de Valois, les monnaies de Chartres, d'Anjou, et de Louis de Clermont, seigneur de Bourbon, celles de Clermont et du Bourbonnais. Il projetait d'établir dans toute la France un seul poids, une seule mesure, une seule monnaie, projets que sa mort précipitée firent évanouir avec lui.

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