Изображения страниц
PDF
EPUB

aussi mal gardée; mais ils faillirent (manquèrent) en leur entente (intention), car les portes et le guichet étoient fermés bien et étroitement: aussi la

ફ્

gens

et

guète (entrée) du Châtel ouït la frainte (bruit) et </ l'aperçut de sa garde: si fut tout ébahi, et commença à sonner et à corner en sa buisine (trompette): « trahis! trahis!» Si s'éveillèrent toutes les soudoyés du châtel; mais point ne vuidèrent de leur fort. Quand messire Gautier de Mauny sentit les gens de Mortagne émouvoir, il se retraist (retira) tout bellement devers la porte; mais il fit bouter le feu en la rue encontre le château, qui tantôt s'emprit et alluma; et furent bien à cette matinée soixante maisons arses (brulées) et les gens de Mortagne moult effrayés, car ils cuidoient (croyoient) être tous pris. Mais le sire de Mauny et ses gens se partirent de la ville et chevauchèrent arrière devers Condé et passèrent là l'Escaut et la rivière de Hainne; et puis chevauchèrent le chemin de Valenciennes, et le costièrent (cotoyèrent) à la droite main, et vinrent à Denain, et rafraîchirent en l'abbaye, et puis passèrent outre devers Bouchain, et firent tant au châtelain de Bouchain que les portes leur furent ouvertes, et passèrent là une rivière qui y queurt (court), qui se fiert (jette) en l'Escaut, et vient d'amont devers Arleux en Pople. Après ce quand ils fu- / rent tout outre Bouchain et la rivière, ils s'envinrent à un fort châtel qui se tenoit de l'évêque de Cambray et de Cambrésis, et l'appelle-t-on Thun l'Évê

(1) Cette rivière s'appelle le Senset.

(1339) que, et siéd sur la rivière d'Escaut. En ce château n'avoit adonc aucune garde suffisant, car le pays ne cuidoit (croyoit) point être en guerre. Si furent ceux de Thun soudainement surpris, et le châtel pris et conquis et le châtelain et sa femme dedans; et en fit le sire de Mauny une bonne garnison et y ordonna à demeurer un sien frère chevalier qui s'appeloit messire Gille Guillaume/de Mauny que on dit Grignart, lequel fit depuis à ceux de Cambrésis et à la cité de Cambray plusieurs détourbiers (troubles); et faisoit ses courses trois ou quatre fois la semaine jusques devant la bonne cité de Cambray, et venoit escarmoucher jusqu'aux barrières, où il faisoit moult grandes et belles appertises d'armes, car le dit château de Thun siéd à une lieue près de la dite cité de Cambray. Quand monseigneur Gautier de Mauny eut fait ses entreprises, ainsi comme je vous ai conté ci-devant, il s'en retourna atout (avec) grand profit, avec une partie de ses compagnons, car il en avoit laissé une partie avec monseigneur Grignart son frère, pour lui aider à garder Thun l'Évêque, et fit tant qu'il vint en Brabant par devers le roi Édouard d'Angleterre son seigneur qu'il trouva à Malines, qui le reçut et conjouit moult grandement, et lui recorda (raconta) une grande partie de ses chevauchées, et comment il avoit pris Thun l'Évêque et illuec (là) mis et laissé son frère en garnison contre ceux de Cambray; dont le roi Anglois fut moult durement réjoui quand il l'eut ainsi ouï parler, et le tint à moult grand vasselage et grand' prouesse, comme

vrai étoit.

་་་་འ་་་་

CHAPITRE LXXX.

COMMENT LE ROI DE FRANCE SE POURVUT BIEN ET GRANDEMENT DE GENS D'ARMES ET ENVOYA GRANDS GARNISONS AU PAYS DE CAMBRÉSIS; ET COMMENT LES NOяMANDS PRIRENT HANTONNE (SOUTHAMPTON).

Vous avez bien ci-dessus ouï recorder "sur quel état les seigneurs de l'empire se départirent du roi Anglois, et du parlement qui fut à Malines, et comment ils envoyèrent défier le roi de France. Sitôt que le roi Philippe se sentit défié du roi Anglois et de tous ses alliés, il vit bien que c'étoit acertes (sérieux), et qu'il auroit la guerre. Si se pourvut selon ce bien et grossement, et retint gens d'armes et soudoyers à tous côtés, et envoya grands garnisons en Cambrésis; car il pensoit bien que dececôté il auroit premièrement assaut. Et envoya messire le Galois de la Baume (2), un bon chevalier de Savoye, devers Cambray, et le fit capitaine, avec messire Thibaut de Moreuil et le seigneur de Roye; et étoient bien, que Savoisiens que François, deux cents lances; et envoya encore le dit roi Philippe saisir le comté de Ponthieu que le roi d'Angleterre avoit tenu par

(1) Ce chapitre manque dans un assez grand nombre de manuscrits. J. D.

(2) Étienne de la Baume, dit le Galois, grand maître des arbalétriers de France. (Voy. l'Hist, gén. de la mais, de Fr. T. 8. P. 5.) J. D.

FROISSART. T. I.

15

avant de par madame sa mère, et manda et pria aucuns seigneurs de l'empire, tels comme le comte de Hainaut son neveu, le duc de Lorraine, le com te de Bar, l'évêque de Metz, l'évêque de Liége monseigneur Aoulz (Adolphe), de la Marck que ils ne fissent nuls mauvais pourchas (brigues) contre lui ni à son royaume. Le plus de ces seigneurs lui manderent que ainsi ne feroient-ils. Et adonc le comte de Hainaut lui rescripvit (récrivit) moult courtoisement et lui signifia qu'il seroit appareillé à lui et à son royaume aider à défendre et garder contre tout homme; mais si le roi Anglois vouloit guerroyer en l'empire, comme vicaire et lieutenant de l'empereur, il ne lui pouvoit refuser son pays ni son confort, car il tenoit en partie sa terre de l'empereur: si lui doit, ou à son vicaire, toute obéissance. De cette rescription se contenta le roi de France assez bien, et laissa passer légèrement, et n'en fit nul grand compte, car il se tenoit fort assez pour résister contre ses ennemis. Si très tôt que messire Hugues Quieret et ses compagnons qui se tenoient sur mer entendirent que les défiances étoient et la guerre ouverte entre France et Angleterre, ils vinrent un dimancheau matin au hâvre de Hantonne (Southampton), entrcmentes (pendant) que les gens étoient à messe; et entrèrent les dits Normands et Génois en la ville, et la prirent, et la pillèrent, et robèrent tout entièrement, et y tuèrent moult de gens, et violèrent

(1) Ce prélat se nommoit Ademare de Monteil. (Hist. des Év. de Metz par le P. Meurisse, . 499.) J.D.

plusieurs femmes et pucelles, dont ce fut dommage, et chargèrent leurs nefs et leurs vaisseaux de grand pillage qu'ils trouvèrent en la ville, qui étoit pleine, drue et bien garnie, et puis rentrèrent en leurs nefs. Et quand le flux de la mer fut revenu, ils

(1) Ce n'étoit là qu'un léger témoignage du zèle qui animoit alors les Normands. Ils désiroient avec tant d'ardeur de porter la guerre en Angleterre qu'ils envoyèrent au commencement de cette année proposer au roi d'en faire la conquête à leurs frais, s'il vouloit mettre à leur tête leur duc son fils aîné. Leurs députés furent admis à l'audience du roi au bois de Vincennes, le 23 mars 1338 (1339), et leurs offres furent acceptées. Il fut convenu qu'ils fourniroient pour cate expédition quatre mille hommes d'armes et vingt mille hommes de pied, dont cinq mille arbalétriers, tous pris dans la province, excepté mille hommes d'armes que le duc pourroit choisir ailleurs et qui seroient néanmoins stipendiés par les Normands. Ils s'obligeoient à entretenir ces troupes à leurs dépens pendant dix semaines, et même quinze jours en sus, si lorsque le duc seroit passé en Angleterre son conseil jugeoit cette prolongation nécessaire; mais ces douze semaines passées, si le duc ne licencioit point les troupes, elles devoient être à ses gages. Le roi s'obligeoit de son côté à tenir sur mer une flotte assez considérable pour la sûreté du passage et du retour de l'armée, ainsi que du transport des vivres. Si l'expédition étoit différée à une autre année, le roi devoit le leur notifier trois mois avant l'embarquement et déduire sur leur service de l'année les frais qu'auroient occasionnés les préparatifs du passage. Les Normands s'obligeoient encore, en cas que le royaume fût attaqué par les ennemis, à marcher à sa défense avec le nombre de troupes susdit pendant l'espace de huit semaines seulement, à condition toutefois que le roi ou leur duc seroit à l'armée, et que durant l'année où la province feroit cette aide elle seroit exempte de l'arrière-ban. «Si l'Angleterre est conquise, comme on l'espère, la couronne appartiendra dès lors au duc de Normandie et après lui à ses héritiers rois de France à perpétuité. Les terres et droits des Anglois nobles et roturiers séculiers appartiendront aux églises, barons, nobles et bonnes villes de Normandie; et la portion des dites églises sera amortie par le roi jusqu'à vingt mille livres sterling de rente. Les biens appartenant au pape, à l'église de Rome et à celle d'Angleterre demeureront dans leur entier et ne seront point compris dans la conquête. Et comme le roi veut toujours agir de bonne

« ПредыдущаяПродолжить »