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lippot et lui dit : «Chastelain, vous oyez que le roi notre sire me mande et commande; si que, de par lui, je vous commande que demain vous fassiez votre monstre de vos compagnons en la place devant le châtel, et tantôt après la vôtre je ferai la mienne, parquoi vous la verrez aussi, si vaudra trop mieux, en cette même place: si en recrirons l'un par l'autre la vérité à notre très cher seigneur le roi d'Angleterre; et aussi, si il besogne argent à vos compagnons, je crois bien oil, tantôt la montre faite, je vous en prêterai, parquoi vous les payerez leurs gages; car le roi d'Angleterre notre sire le commande ainsi en une lettre close par laquelle me mande que je les paye sur mon office. » Philippot, qui ajoutoit en toutes ces paroles grand'loiauté, lui dit : «Maieur, de par Dieu! puisque c'est à demain que je dois faire ma montre, je le ferai volontiers, et les compagnons en auront grand'joie, pourtant qu'ils seront payés; car ils désirent à avoir argent.» Adonc laissèrent-ils les paroles sur tel état, et allèrent diner; et furent tout aises. Après diner cil Philippot se retrait ens ou châtel de la Rochelle, et conta à ses compagnons tout ce que vous avez ouy, et leur dit : «Seigneurs, faites bonne chère, car demain, tantôt après votre montre, vous serez payés de vos gages, car le roi l'a ainsi mandé et ordonné au maieur de cette ville, et j'en ai vu les lettres. >> Les soudoyers, qui désiroient à avoir l'argent, car on leur devoit de trois mois ou plus, répondirent: « Veci riches nouvelles! » Si commencèrent à fourbir leurs bassinets, à rouler leurs cottes de fer et à esclaircir leurs épées ou armures telles qu'ils les avoient.

Ce soir se pourvéit tout secrètement sire Jean Caudourier, et informa la plus grand'partie de ceux de la Rochelle qu'il sentoit de son accord, et leur donna ordonnance pour lendemain à savoir comment ils se maintiendroient. Assez près du châtel de la Rochelle et sur la place où cette montre se devoit faire, avoit vieilles maisons où nul ne demeuroit. Si dit le maieur que là dedans on feroit une embûche de quatre cents hommes d'armes, tous les plus aidables de la ville, et quand cils du châtel seroient hors issus, ils se mettroient entre le châtel et eux et les enclorroient; ainsi seroient-ils attrappés; ni il véoit mie que par autre voie il les pût avoir. Cil conseil fut tenu, et cils nommés et élus en la ville

qui devoient être en l'embûche; et y allèrent tout secrètement très la nuit, tout armés de pied en cap et eux informés quelle chose ils feroient. Quand ce vint au matin après soleil levant, le maieur de la Rochelle et les jurés, et cils de l'office tant seulement, se trairent tout désarmés, par couverture, pour plus légèrement attraire ceux du châtel avant; et s'en vinrent sur la place où la montre se devoit faire; et étoient montés chacun sur bons gros coursiers, pour tantôt partir quand la mêlée se commenceroit. Le châtelain, sitôt que il les vit apparoir, il háta ses compagnons et dit : «< Allons, allons là jus en la place, on nous attend. » Lors se départirent du châtel tous les compagnons, sans nulle soupçon, qui montrer se vouloient et qui argent attendoient, et ne demeurèrent au dit châtel fors que varlets et mesnées, et vuidèrent la porte et la laissèrent toute ample ouverte, pour ce que ils y cuidoient tantôt retraire; et s'en vinrent sur la place eux remontrer au maieur et aux jurés qui là campoient. Quand ils furent tous en un mont, le maieur, pour eux ensonnier, les mit à parole, et disoit à l'un et puis à l'autre : «Encore n'avezvous pas tout votre harnois pour prendre pleins gaiges, il le vous faut amender. » Et cils disoient : « Volontiers. » Ainsi en janglant et en bourdant il les tint tant que l'embûche saillit hors, armés si bien que rien n'y failloit; et se boutèrent tantôt entre le châtel et eux, et se saisirent de la porte. Quand les soudoyers virent ce, si connurent bien que ils étoient trahis et déçus. Si furent bien ébahis, et à bonne cause. A ces coups se partit le maieur et tous les jurés à cheval, et laissèrent leurs gens convenir, qui tantôt furent maîtres de ces soudoyers, qui se laissèrent prendre bellement, car ils virent bien que deffense n'y valoit rien. Les Rochelois les firent là un et un désarmer sur la place, et les menèrent en prison en la ville en divers lieux, en tours et en portes de la ville, où plus n'étoient que eux deux ensemble. Assez tôt après ce, vint le maieur tout armé sur la place et plus de mille hommes en sa compagnie. Si se trait incontinent devers le châtel, qui en l'heure lui fut rendu, car il n'y avoit dedans fors menues gens, meschines et varlets, en qui il n'y avoit aucune deffense; mais furent tout joyeux quand ils se purent rendre et que on les laissa en paix. Ainsi fut reconquis le châtel de la Rochelle.

Quand le duc de Berry et le duc de Bourbon, et aussi le duc de Bourgogne, qui s'étoient tenus moult longuement sur les marches d'Auvergne et de Limousin à plus de deux mille lances, entendirent ces nouvelles que cils de la Rochelle avoient bouté hors les Anglois de leur châtel, et le tenoient pour leur, si se avisèrent que ils se trairoient celle part pour voir et savoir quelle chose ils voudroient faire. Si se départirent de la marche où ils s'étoient tenus, et chevauchèrent devers Poitou le droit chemin pour venir à Poitiers devers le connétable. Si trouvèrent une ville en leur chemin en Poitou qu'on dit SaintMaixent qui se tenoit Angloise; car le château qui sied au dehors de la ville étoit en la gouvernance des Anglois. Sitôt que cils seigneurs et leurs routes furent venus devant la ville, cils de Saint Maixent se rendirent, saufs leurs corps et leurs biens; mais le château ne se voult rendre. Donc le firent assaillir les dessus dits seigneurs moult efforcément, et là eut un jour tout entier grand assaut, et ne put ce jour être pris. A lendemain, de rechef ils vinrent assaillir si efforcément et de si grand'volonté que ils le prirent, et furent tous cils morts qui dedans étoient. Puis chevauchèrent les seigneurs outre, quand ils eurent ordonné gens de par eux pour garder la ville, et vinrent devant Mellé, et la prirent et la mirent en l'obéissance du roi de France; et puis vinrent devant le châtel de Sivray. Cils de Sivray se tinrent deux jours, et puis se rendirent, saufs leurs corps et leurs biens. Ainsi les seigneurs en venant vers la ville de Poitiers, conquéroient villes et châteaux, et ne laissoient rien derrière eux qui ne demeurât en l'obéissance du roi de France; et tant cheminèrent qu'ils vinrent à Poitiers, où ils furent reçus à grand'joie du connétable et de ses gens et de ceux de la cité.

Quand les trois ducs dessus nommés furent venus à Poitiers, et toutes leurs routes, qui se logèrent là environ sur le plat pays pour être mieux à leur aise, le duc de Berry eut conseil qu'il enverroit devers ceux de la Rochelle pour savoir quelle chose ils voudroient dire et faire; car encore se tenoient si clos que nul n'entroit ni issoit en leur ville. Si envoya le dit duc certains hommes et messages pour traiter et savoir mieux leur entente. Les messages, de par le duc de Berry et le connétable, furent bellement reçus, et répondu que ils envoyeroient devers

le roi de France; et si le roi leur vouloit accorder ce qu'ils demandoient, ils demeureroient bons François ; mais ils prioient au duc de Berry et au connétable que ils ne se voulsissent mie avancer, ni leurs gens, pour eux porter nul dommage ni contraire jusques à tant qu'ils auroient mieux cause. Ce fut ce que les messages rapportèrent. Cette réponse plaisit assez bien au dessus dit duc de Berry et au connétable, mais ils se tinrent tout cois à Poitiers et sur la marche sans rien forfaire aux Rochelois. Et Yvain de Galles par mer aussi les tenoit pour assiégés, comment que il ne leur fit nul contraire.

Or vous dirai de l'état des Rochelois et sur quel point et article ils se fondèrent et persévérèrent. Tout premièrement, ils envoyèrent douze de leurs bourgeois des plus suffisans et notables à Paris, devers le roi de France, sur bon saufconduit que ils eurent du roi, allant et venant, ainçois que ils se partissent de la Rochelle. Le roi, qui les désiroit à avoir à amis et pour ses obéissans, les reçut liement, et ouït volontiers toutes leurs requêtes qui furent telles que je vous dirai. Cils de la Rochelle vouloient tout premièrement, ainçois que ils se mesissent en l'obéissance du roi, que le château de la Rochelle fût abattu; et après ils vouloient que le roi de France, pour toujours mais, il et ses hoirs, les tint comme de son droit domaine de la couronne de France, et jamais n'en fussent éloignés pour paix, pour accord, pour mariage, ni pour alliance quelconque que il eût au roi d'Angleterre ni autre seigneur. Tiercement ils vouloient que le roi de France fit là forger florins et monnoie, de tel prix et alloi sans nulle exception que on forgeoit à Paris. Quartement ils vouloient que nul roi de France, ses hoirs ni ses successeurs, ne pussent mettre ni asseoir sur eux ni sur leurs masuyers, taille, subside, gabelle, imposition ni fouage, ni chose qui ressemblat, si ils ne l'accordoient ou donnoient de grâce. Quintement ils vouloient et requéroient que le roi les fit absoudre et dispenser de leur、 foi et sermens qu'ils avoient juré et promis au roi d'Angleterre, laquelle chose leur étoit un grand préjudice à l'âme, et s'en sentoient grandement chargés en conscience: pourtant ils vouloient que le roi, à ses dépens, leur impétråt du saint père le pape absolution et dispensation de tous ces forfaits.

Quand le roi de France ouït leurs articles et leurs requêtes, si leur en répondit moult doucement qu'il en auroit avis. Sur ce le dit roi s'en conseilla par plusieurs fois à plusieurs sages de son royaume, et tint là dalez lui moult longuement ceux de la Rochelle: mais finablement, de toutes leurs demandes il n'en put rien rabattre; et convint que il leur accordât toutes, scellåt et cancellat et confirmât pour tenir à perpétuité. Et se partirent du roi de France bien contens, chartres bullées et scellées, tout ainsi que ils le vouldrent avoir et deviser; car le roi de France les désiroit moult à avoir en son obéissance, et recommandoit la ville de la Rochelle pour la plus notable ville que il eût par delà Paris; et encore, à leur département, leur donna-t-il grands dons et beaux joyaux et riches présens pour reporter à leurs femmes. Donc ils se partirent du roi et de Paris et se mirent au retour.

Or retournèrent les bourgeois de la Rochelle en leur ville, qui avoient séjourné, tant à Paris que sur le chemin, bien deux mois. Si montrerent à ceux qui là envoyés les avoient et à la communauté de la ville quelle chose ils avoient exploitées, et impétrée, sans nulle exception, toutes leurs demandes. De ce eurent-ils grand'joie, et se contentèrent grandement bien du roi et de son conseil. Ne demeura mie depuis trois jours que ils mirent ouvriers en œuvre, et firent abattre leur châtel, et mettre tout rès-à-rès de la terre, ni oncques n'y demeura pierre sur autre; et l'assemblèrent là sur la place en un mont. Depuis en firent-ils ouvrer aux nécessités de la ville, et paver aucunes rues qui en devant en avoient grand métier.

Quand ils eurent ainsi fait, ils demandèrent au duc de Berry qu'il vint là s'il lui plaisoit, et que on le recevroit volontiers au nom du roi de France, et feroient tout ce qu'ils devoient faire. Le duc de Berry y envoya monseigneur Bertran le connétable, qui avoit commission et procuration de prendre la possession pour le roi de France. Lors se départit de Poitiers à cent lances le dit connétable, à l'ordonnance du duc de Berry, et chevaucha tant qu'il vint en la ville de la Rochelle, où il fut reçu à grande joie, et montra de ce procuration du dit roi son seigneur, qui l'avoit établi ès parties de par de là comme son corps représentant. Si prit la foi et l'hommage des hommes de la ville, et y séjourna

trois jours; et lui furent faites toutes droiturs ainsi comme proprement au roi, et y recr grands dons et beaux présens, et aussi il a donna foison aux dames ef aux damoiselles; quand il eut assez revellé et joué, il se partit de la Rochelle et retourna arrière à Poitiers1.

Ne demeura guère de temps puis ce di que le roi de France envoya ses messages devers Yvan de Galles, en lui mandant et signifiant que ill verroit volontiers, et son prisonnier le captal& Buch. Encore ordonna le roi en ce voyage que l'amiral du roi Henry de Castille, Dam Radhi de Rous, se partit à toute sa navie et retournit en Espagne; car pour celle saison il ne les vo loit plus ensonnier. Ainsi se défit l'armée de la mer; et retournèrent les Espaignols, et furent, ains leur département, tout sec payés de leurs gages, tant et si bien qu'ils s'en contentèrent grandement du roi de France et de son paie ment. Et Yvain de Galles, au commandement et ordonnance du roi, prit le chemin de Paris, et lai amena le captal de Buch, dont le roi eut grandjoie et lequel bien connoissoit, car il l'avoit vu autrefois Si lui fit grand'chère et lie, et le tint en prison courtoise sans nulle contrainte; car volontiers l'eût retrait à son amour par quoi il fat retourné François. Et lui fit promettre et offrir grands dons, grands héritages et grands profits; mais le captal n'y voult oncques entendre: mais bien disoit aux barons et aux chevaliers de France qui le visitoient et qui de cela parloient, que il se rançonneroit volontiers et grandement, cinq ou six fois plus que sa revenue par an ne lui valoit. Mais le roi n'avait point conseil de ce faire: si demeura la chose en cel état, et fut de premier mis au châtel du Louvre, et là gardé bien et soigneusement; et le visitoient souvent les ba rons et les chevaliers de France. Or reviendronsnous aux besognes de Poitou qui n'étoient mie encore toutes finies.

1 La Rochelle se rendit aux Français le 15 août 1372 Cascales rapporte une lettre du roi Henri de Castille à la ville de Murcie, datée de Bénévent, 27 septembre, année 1410 (c'est à-dire 1372, d'après notre calcul), et dans la quelle il annonce que La Rochelle venait de se rendre au roi de France, avec cinq autres villes et châteaux pour la fête de Notre-Dame d'août : El dia de Nuestra-Señora de Agosto que agora pasd.

CHAPITRE CCCLII.

Des forteresses que messire Bertran du Guesclin prit en Rochelois.

Quand le connétable de France eut pris la saisine et la possession de la bonne ville de la Rochelle et il se fut retrait à Poitiers, si eurent conseil les seigneurs que ils se partiroient de là et viendroient devant aucuns châteaux qui étoient en la marche de la Rochelle; par quoi la ville, s'ils se partoient du pays, demeureroit en plus grand'sûreté; car encore étoient Anglois Marant, Surgières et Fontenay le Comte; et couroient tous les jours cils de ces garnisons jusques aux portes de la Rochelle, et leur faisoient moult de destourbiers. Si se départirent de Poitiers en grand arroy, le duc de Berry, le duc de Bourgogne, le duc de Bourbon, le Dauphin d'Auvergne, le sire de Sully, le connétable de France, les maréchaux de France et bien deux mille lances; et s'en vinrent premièrement devant le châtel de Benon. Si en étoit capitaine, de par le captal, un écuyer d'honneur de la comté de Foix qui s'appeloit Guillaume de Pan, et un chevalier de Naples qui se nommoit messire Jacques, deux apperts hommes malement; et avoient là dedans avec eux de bons compagnons qui ne furent mie trop effrayés quand cils seigneurs et le connétable les eurent assiégés; mais se confortèrent en ce que bien leur sembloit qu'il étoit assez pourvu de vivres et d'artillerie. Si furent assaillis plusieurs fois; mais trop bien se défendirent, ou de deux ou de trois assauts à ce commencement qu'ils eurent. Assez près de là sied la garnison de Surgières, où il avoit bien soixante lances d'Anglois, tous bons compagnons et droites gens d'armes si se avisèrent un jour que, de nuit, ils viendroient réveiller l'ost des François, et s'aventureroient s'ils pouvoient rien conquérir. Si se départirent de leur fort quand il fut tout à vèpres, et chevauchèrent devers Benon, et se boutèrent environ mie-nuit en l'ost, et chevauchèrent si avant qu'ils vinrent sur le logis du connétable et là s'arrêtèrent. Si commencèrent à abattre et à découper, et blesser gens qui de ce ne se donnoient garde. Si en y eut moult de navrés et de mal appareillés; et par espécial, du logis du connétable, fut occis un sien écuyer d'honneur que il aimoit outre mesure. L'ost s'estourmit et s'arma tantôt. Cils se retrairent quand

ils virent que point fut et qu'ils eurent fait leur emprise, et retournèrent sans dommage en leur garnison. Quand le connétable sçut la vérité de son écuyer que tant aimoit, qui étoit mort, si fut tellement courroucé que plus ne put, el jura que jamais de là ne partiroit si auroit pris le châtel de Benon, et seroient sans merci tous cils morts qui dedans étoient. A lendemain, quand il eut fait enterrer son écuyer, il commanda toutes ses gens armer et venir avant à l'assaut; et pour mieux exploiter, il s'arma et y alla. Lå eut grand assaut et dur, et bien continué; et tellement s'y éprouvèrent messire Bertran et ses gens, que le châtel de Benon fut pris et conquis de force, et tous cils qui dedans étoient morts ou occis, sans nullui prendre à merci.

Après ce que le connétable de France eut fait son emprise du châtel de Benon et de tous ceux qui dedans étoient, il donna conseil de traire avant au châtel de Marant, à quatre lieues de la Rochelle. Du châtel de Marant étoit capitaine un Allemand qui s'appeloit Wissebare, hardi homme malement, et avec lui avoit foison d'Allemands; mais quand ils virent que cils seigneurs de France venoient si efforcément, et que rien ne duroit devant eux, et que cils de la Rochelle s'étoient tournés François, et que le connétable avoit tous mis à mort ceux du châtel de Benon, si furent si effréés que ils n'eurent volonté d'eux tenir, mais se rendirent, et la forteresse, et se tournèrent tous François, et le jurèrent à être de ce jour en avant, en la main du seigneur de Pons que le connétable y envoya pour prendre la saisine et la possession; mais ils y mirent une condition, tant que on les voudroit payer de leurs gages, ainsi que les Anglois les avoient payés bien et courtoisement; et si on en étoit en deffaute, ils se pouvoient partir sans nul reprochement. Si demeurèrent en cel état comme en devant pour tenir et garder la forteresse. Et puis passèrent les seigneurs outre et vinrent devant le châtel de Surgières. Quand ils furent là venus, ils le trouvèrent tout vuide et tout ouvert; car les Anglois qui l'avoient gardé toute la saison, pour la doutance du connétable, s'en étoient partis et boutés en autres forteresses en Poitou. Si entrèrent les François dedans le châtel de Surgières. Quand ils furent là venus, ils le rafreschirent de nouvelles gens et puis chevauchèrent devant Fontenay le Comte, où la

femme messire Jean Harpedane se tenoit, et avec li plusieurs bons compagnons qui ne furent à ce commencement effréés de tenir la forteresse contre les François.

Quand le duc de Berry et les autres ducs, et le connétable de France, furent venus devant Fontenay le Comte en Poitou, si assiégèrent la ville et le châtel par bonne ordonnance, et ceux qui dedans étoient; et puis ordonnèrent engins et manière comment ils les pourroient conquerre. Si y firent plusieurs assauts le terme qu'ils y furent; mais ils ne l'avoient mie d'avantage, car ils trouvèrent ceux de la garnison apperts et légers, et bien ordonnés pour eux deffendre. Si y eut là, devant la ville de Fontenay, plusieurs assauts, escarmouches et grands appertises d'armes, et moult de gens blessés, car presque tous les jours y avoient aucuns faits d'armes par deux ou trois estours ; si ne pouvoit remanoir il n'en que eût des blessés. Et vous y dis que si cils de Fontenay sentissent ni eussent espérance que ils pussent être confortés dedans trois ou quatre mois, de qui que ce fût, par mer ou par terre, ils se fussent assez tenus, car ils avoient pourvéances à grand'foison. Si étoient en forte place. Mais quand ils imaginèrent le péril, que ils étoient là enclos, et que de jour en jour on leur promettoit que si de force pris étoient ils seroient tous morts et sans merci, et si ne leur apparoit confort de nul côté, ils s'avisèrent et entendirent aux traités du connétable, qui furent tels que ils se pouvoient partir, si ils vouloient, et emporter tout le leur, et seroient conduits jusques à Thouars où tous les chevaliers de Poitou se tenoient et étoient là re

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cueillis. Cil traité passa et fut tenu; et se partirent cils de Fontenay qui Anglois étoient; et emmenèrent leur dame avec eux; et se retrairent, sur le conduit du connétable, en la ville de Thouars où ils furent recueillis. Ainsi eurent les François Fontenay le Comte, la ville et le châtel, et y ordonnèrent à capitaine un chevalier, à vingt lances dessous lui, qui s'appeloit messire Renault de Larzi; et puis retournèrent gevers la cité de Poitiers et exploitèrent tant qu'ils y vinrent.

CHAPITRE CCCLIII.

Comment les François mirent le siége devant Thouars; comment le roi d'Angleterre se mit en mer pour venire Poitou lever leur siége.

Quand cils seigneurs de France furent retraits à Poitiers, et rafraîchis par quatre jous. et leurs chevaux, ils eurent conseil qu'ils s'en partiroient, et s'en iroient devant Thours, où tous les chevaliers de Poitou se tenoient, dis qui soutenoient l'opinion du roi d'Angleterre et bien y en avoit cent, uns et autres; et mettroient le siége; et ue s'en partiroient si en a roient une fin, ou ils seroient tous François tous Anglois. Si se partirent en grand arroy bien ordonnés, de la cité de Poitiers; et étoient bien trois mille lances, chevaliers et écuyers, et quatre mille à pavois, parmi les Gennevois. S chevauchèrent tant ces gens d'armes que is vinrent devant Thouars où ils tendoient à venir. Si ordonnèrent et établirent tantôt leur siége grand et bel, et tout à l'environ de la ville et da châtel; car bien étoient gens pour ce faire: ne y laissoient nullui entrer, ni issir; ni por n'assailloient, car bien savoient que par assaut jamais ne les auroient; car là dedans ave trop de bonnes gens d'armes ; mais ils disoien que là tant seroient que ils les affameroient, s le roi d'Angleterre de sa puissance, ou ses fans ne venoient lever le siége. Quand les baro et les bacheliers qui là dedans enclos étoient, tes que messire Louis de Harecourt, le sire de Par thenay, le sire de Tarste, messire Hugues de vone, messire Aymery de Rochechouart, messi Percevaux de Couloingne, messire Regnaut Thouars, le sire de Roussillon, messire Guillaume de Crupegnac, messire Joffroy d'Argenton, mes sire Jacques de Surgières, messire Jean d'Angle messire Guillaume de Montendre, messire Ma brun de Linières, et plusieurs autres que je puis mie tous nommer, perçurent la manière d imaginèrent l'arroy et l'ordonnance des François

comment ils étoient là traits et se fortifioient, e multiplioient tous les jours, si eurent sur ce avis et conseil, car bien véoient que cils seigneurs qui assiégés les avoient, ne se partiroient si auroient leur volonté et entente, ou en partie Si dit messire Percevaux de Couloingne, qui f un sage et imaginatif chevalier, et bien enla gagé, un jour qu'ils étoient tous ensemble e

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