Изображения страниц
PDF
EPUB

Il dit; la mère pleure et le père consent,
Et la belle Égérie accepte en rougissant.
Et cependant il veut que cette île si chère
Reprenne sa parure et sa forme première.
Un pont joint à ses bords ce fortuné séjour,
Sacré par le malheur, plus sacré par l'amour;
Mais son art l'affermit, et l'onde mugissante
Vient briser sur ses bords sa colère impuissante.
Ainsi cette île errante eut un frein dans les flots,
Le bonheur un asile, et l'amour sa Délos.

Fin du second Chant.

Que j'aime le mortel, noble dans ses penchans,

Qui cultive à la fois son esprit et ses champs!
Lui seul jouit de tout. Dans sa triste ignorance
Le vulgaire voit tout avec indifférence:

Des desseins du grand Être atteignant la hauteur,
Il ne sait point monter de l'ouvrage à l'auteur.
Non, ce n'est pas pour lui qu'en ses tableaux si vastes
Le grand peintre forma d'harmonieux contrastes.
Il ne sait pas comment, dans ses secrets canaux,
De la racine au tronc, du tronc jusqu'aux rameaux,
Des rameaux au feuillage accourt la sève errante ;
Comment naît des cristaux la masse transparente,
L'union, les reflets et le jeu des couleurs.
Étranger à ses bois, étranger à ses fleurs,

Il ne sait point leurs noms, leurs vertus, leur famille.
D'une grossière main il prend dans la charmille
Ses fils au rossignol, au printemps ses concerts.

Le

sage seul, instruit des lois de l'univers,

Sait goûter dans les champs une volupté pure:

C'est

pour l'ami des arts qu'existe la nature.

Vous donc, quand des travaux ou des soins importans

Du bonheur domestique ont rempli les instans,

Cherchez autour de vous de riches connoissances

Qui, charmant vos loisirs, doublent vos jouissances.
Trois règnes à vos yeux étalent leurs secrets.

Un maître doit toujours connoître ses sujets :
Observez les trésors que la nature assemble.

Venez; marchons, voyons, et jouissons ensemble.
Dans ces aspects divers que de variété !
Là tout est élégance, harmonie et beauté.
C'est la molle épaisseur de la fraîche verdure;
C'est de mille ruisseaux le caressant murmure,
Des coteaux arrondis, des bois majestueux
Et des antres rians l'abri voluptueux.

Ici d'affreux débris, des crevasses affreuses,
Des ravages du temps empreintes désastreuses;
Un sable infructueux, aux vents abandonné;
Des rebelles torrens le cours désordonné;

La ronce, la bruyère et la mousse sauvage,

Et d'un sol dévasté l'épouvantable image.

Partout des biens, des maux, des fléaux, des bienfaits!

Pour en interpréter les causes, les effets,

Vous n'aurez point recours à ce double génie,

Dont l'un veut le désordre, et l'autre l'harmonie :

Pour vous développer ces mystères profonds,

Venez, le vrai génie est celui des Buffons.

Autrefois, disent-ils, un terrible déluge,

Laissant l'onde sans frein et l'homme sans refuge,
Répandit, confondit en une vaste mer,

Et les eaux de la terre et les torrens de l'air;
Où s'élevoient des monts, étendit des campagnes;
Où furent des vallons, éleva des montagnes ;
Joignit deux continens dans les mêmes tombeaux ;
Du globe déchiré dispersa les lambeaux;

Lança l'eau sur la terre et la terre dans l'onde,

Et roula le chaos sur les débris du monde.

De là ces grands amas dans la terre enfermés,
Ces bois, noirs alimens des volcans enflammés,
Et ces énormes lits, ces couches intestines,
Qui d'un monde sur l'autre entassent les ruines.

1

Ailleurs d'autres dépôts se présentent à vous, Formés plus lentement par des moyens plus doux. Les fleuves, nous dit-on, dans leurs errantes courses, En apportant aux mers les tributs de leurs sources, Entraînèrent des corps l'un à l'autre étrangers, Quelques-uns plus pesans, les autres plus légers. Les uns au fond de l'eau tout à coup se plongèrent; Quelque temps suspendus les autres surnagèrent, De là précipités dans l'humide séjour,

Sur ces premiers dépôts s'assirent à leur tour.

591614

Des couches de limon sur eux se répandirent,
Sur ces lits étendus d'autres lits s'étendirent;
Des arbustes sur eux gravèrent leurs rameaux,
Non brisés par des chocs, non dissous par les eaux,
Mais dans leur forme pure. En vain leurs caractères
Semblent offrir aux yeux des plantes étrangères, 2
Que des fleuves, des lacs et des mers en courroux
Le roulement affreux apporta parmi nous :
Leurs traits inaltérés, les couches plus profondes
Des lits que de la mer ont arrêtés les ondes;
Souvent deux minces lits, léger travail des eaux,
L'un sur l'autre sculptés par les mêmes rameaux ; 3
Tout d'une cause lente annonce aux yeux l'ouvrage.
Ainsi, sans recourir à tout ce grand ravage,
Le sage ne voit plus que des effets constans,
Le cours de la nature et la marche du temps.

Mais j'aperçois d'ici les débris d'un village:
D'un désastre fameux tout annonce l'image.
Quels malheurs l'ont produit? avançons,

consultons

Les lieux et les vieillards de ces tristes cantons.
Dans les concavités de ces roches profondes,
Où des fleuves futurs l'air déposoit les ondes,
L'eau, parmi les rochers se filtrant lentement
De ces grands réservoirs mina le fondement.

« ПредыдущаяПродолжить »