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ci-après. Toute fois il avoit fait par son ennort (conseil) dès longtemps les plus riches joyaux de l'abbaye et de la ville vuider et porter à Mortagne à sauveté (en sûreté), et là fait aller l'abbé et les moines, qui n'étoient taillés d'eux défendre. Ceux de Valenciennes qui avoient été mandés du comte leur seigneur qu'ils fussent à un certain jour devant Saint-Amand, et il seroit à l'autre côté, vinrent, ainsi que commandé leur fut, en très bon convenant (ordre); et étoient bien douze mille combattants. Sitôt qu'ils furent venus devantSaint-Amand, ils se logèrent et mirent en bonne ordonnance, et puis eurent conseil d'aller assaillir. Si firent armer tous

leurs arbalétriers et puis traire (aller) vers le pont de la Scarpe. La commença l'assaut dur et fier et périlleux durement, et en y eut plusieurs blessés et navrés (maltraités) d'un côté et d'autre. Et dura cet assaut tout le jour, que oncques ceux de Valenciennes n'y purent rien forfaire; mais en y eut des morts et des navrés grand'foison des leurs; et leur disoient les bidaus (), par manière de reproche, « Allez boire votre goudale (2), allez. »

Quand ce vint au soir, ceux de Valenciennes se retrairent (retirèrent) tous lassés, et furent moult émerveillés qu'ils n'avoient ouï nulles nouvelles du comte leur seigneur. Si eurent avis qu'ils délogeroient et retourneroient vers Valenciennes : si firent tout trousser et se retrairent (retirèrent) ce même

(1) Voyez la note de la Page 303.

(2) L'ale est une espèce de bière. Goudale est un mot composé de deux mots Flamands gut bonne et ale bière. J. A. B.

soir vers leur ville. Lendemain au matin que ceux de Valenciennes se furent retraits (retirés), le comte de Hainaut se partit du siége de Tournay, si comme dit est, à (avec) grand'compagnie de gens d'armes, de bannières et de pennons, et s'en vint devant Saint-Amand, du côté devers Mortagne. Sitôt qu'ils furent venus, ils se trairent (portèrent) à l'assaut; et là eut moult grand assaut et dur, et gagnèrent les Hainuyers, de venue, les premières barrières, et vinrent jusques à la porte qui ouvre devers Mortagne. Là étoient tous premiers à l'assaut le comte de Hainaut, le sire de Beaumont son oncle, et assailloient de grand courage sans eux épargner; de quoi près fut qu'il ne leur mévint (arrivât mal); car ils furent tous deux si dur rencontrés de deux pierres jetées d'amont (d'en haut), qu'ils en eurent leurs bassinets (effondrés et les têtes toutes étonnées. Adonc fut là qui dit: « Sire, sire, à cet endroitci ne les aurions jamais; car la porte est forte et la • voie étroite, si coûteroit trop des vôtres à conquérir: mais faites apporter de grands mairains ouvrés (travaillés) en manière de piloz (pilotis), et heurter aux murs de l'abbaye; nous vous certifions que par force on la pertuisera (percera) en plusieurs lieux; et si nous sommes en l'abbaye, la ville est nôtre; car il n'y a point d'entre deux entre la ville et l'abbaye.

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Adonc commanda le dit comte que on fit ainsi comme pour le mieux on lui conseilloit, et pour la

(1) Chapeaux de fer en forme de bassine. J. A. B.

tôt prendre. Si quist (chercha) on grands bois de chênes; et puis furent tantôt ouvrés (travaillés) et aiguisés devant;et si s'accompagnoient (mettoient) à un pilot vingt ou trente, et s'écueilloient, et puis boutoient (frappoient) de grand randon (impétuosité) contre le mur; et tant boutèrent (frappèrent) de grand randon (impétuosité), et sivertueusement, qu'ils pertuisèrent (percèrent) le mur de l'abbaye, et rompirent en plusieurs lieux, et entrèrent dedans abondamment, et passèrent une petite rivière qui là étoit, et s'en vinrent sans contredit jusques à une place qui étoit devant le moutier, où le marché de plusieurs choses est; et là étoit le dit sénéchal de Carcassonne en bon convenant (disposition), sa bannière devant lui, qui étoit degueules à un chef d'argent et à deux demi chevrons au chef, et étoit à une bordure d'azur endentée. Là de-lez (près) lui s'étoient recueillis plusieurs compagnons de son pays, qui assez hardiment reçurent les Hainuyers et se combattirent vaillamment, tant qu'ils purent: mais leur défense ne leur valut néant, car Hainuyers y survinrent à trop grand'foison. Et vous dis encore, pour tout ramentevoir (rappeler), à l'entrer des premiers dedans l'abbaye, il y avoit un moine qu'on appeloit damp Froissart qui y fit merveille, et en occit que mehaigna (blessa), au devant d'un pertuis (ouverture) où il se tenoit, plus de dix huit, et n'osoit nul entrer par le lieu qu'il gardoit. Mais finalement il le convint partir; car il vit que Hainuyers entroient en l'abbaye et avoient pertuisé (percé) le mur en plusieurs lieux: si se sauva le dit

moine, au mieux qu'il put, et fit tant qu'il vint à Mortagne.

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CHAPITRE CXXXVIII.

COMMENT LE COMTE DE HAINAUT DÉTRUISIT ET ARDIT (BRULA) LA VILLE ET L'ABBAYE DE S1.-Amand; et puis APRÈS ARDIT ET DÉTRUISIT L'ABBAYE DE Marchiennes.

QUAND le comte de Hainaut et messire Jean de

Hainaut son oncle et la chevalerie de Hainaut furent entrés en l'abbaye de Saint-Amand, ainsi que vous avez ouï, si commanda le dit comte qu'on mit tout à l'épée, sans nullui (personne) prendre à mercy, tant étoit-il courroucé sur ceux de SaintAmand, pour les dépits qu'ils avoient faits à son pays. Si fut la dite ville moult tôt emplie de gens d'armes; et bidaus) et Génois qui là étoient furent enchassés et quis (poursuivis) de rue en rue et d'hôtel en hôtel: peu en échappèrent qu'ils ne fussent tous morts et occis, car nul n'étoit pris à mercy. Mêmement le sénéchal de Carcassonne y fut occis dessous sa bannière, et plus de deux cents hommes d'armes, que environ lui que assez près. Ainsi fut Saint-Amand détruit, et retourna le comte, ce propre soir, devant Tournay. Et le lendemain les gens d'armes et la communauté de Valenciennes vinrent à Saint-Amand, et parardirent (brûlèrent) la ville, et toute l'abbaye, et le grand moutier, et brisèrent toutes les cloches, dont ce fut dommage; car il en y (1) Voyez la note de la Pare 303.

avoit de moult bonnes et mélodieuses; et si ne leur vint à nul profit qui à compter fasse.

Après la destruction de Saint-Amand, le comte de Hainaut, qui trop durement avoit pris cette guerre en cœur, et qui en étoit plus aigre que nul des autres, se départit encore du siége de Tournay, qui avoit en sa route (suite) environ six cents armures deferets'en vint ardoir (brûler) Orchies, Landas et La Celle, et grand'foison de villages là environ, et puis passa, et toute sa route (suite), la rivière de la Scarpe, au dessous de Hasnon, et entrèrent en France, et vinrent à Marchiennes, une grosse et riche abbaye, dont messire Aymes de Warinaut étoit capitaine, et avoit avec lui une partie des arbalétriers de Douay. Là eut grand assaut, car le dit chevalier avoit durement garni la première porte de l'abbaye, qui étoit toute enclose et environnée de grands fossés et parfons (profonds); et se défendirent les François et les moines qui dedans étoient moult vassalment (bravement). Mais finalement ils ne purent durer contre tant de gens d'armes; car ils quirent (cherchèrent) et firent tant qu'ils eurent des bateaux et les mirent dans l'eau, et entrèrent en l'abbaye. Mais il y eut mort et noyé un chevalier Allemand, compagnon au seigneur de Fauquemont, qui s'appeloit messire Bachon de le Wiere, dont le dit sire de Fauquemont fut moult courroucé, mais amender ne le put.

A l'assaut de la porte où messire Aymes de Warinaut se tenoit, furent moult bons chevaliers le comte de Hainaut, le sire de Beaumont son oncle

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